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Seuls 11% des cadres horlogers sondés par Deloitte s’inquiètent de la concurrence d’Apple et des autres. En raison du ralentissement de la demande chinoise, l’optimisme général est par contre en recul
Le coup de sonde a été réalisé en juin et en juillet. Soit avant le salon technologique IFA de Berlin, durant lequel Samsung, Sony ou LG ont présenté leur nouveau modèle de montre intelligente. C’était aussi avant qu’Apple ne présente officiellement son nouveau-né.
Il n’empêche, la cinquantaine de dirigeants et cadres de marques horlogères et de fabricants de composants qui ont répondu au questionnaire de Deloitte se montrent sereins: la montre connectée n’est pas une menace pour l’avenir de l’industrie horlogère. Seuls 11% d’entre eux la considèrent comme telle. A titre de comparaison, l’affaiblissement de la demande domestique, cité par 18% des sondés, leur semble plus préoccupant.
Ils sont par contre 44% à juger que le créneau des montres intelligentes représente la prochaine grande évolution pour le secteur. «Il y a une prise de conscience que cette catégorie montera en puissance», résume Karine Szegedi, l’une des auteurs de l’étude annuelle publiée jeudi.
Ce sentiment paradoxal, un mélange de sérénité relative et de sérieuse considération vis-à-vis des «smartwatches», elle l’explique par le fait que les montres d’entrée de gamme sont le segment le plus exposé à cette nouvelle concurrence. Et que, ces dernières années, ce sont plutôt les montres mécaniques, d’un éventail de prix supérieur aux centaines de francs demandées par Apple, Samsung et les autres, qui ont connu le plus grand succès. En d’autres termes, l’évolution technologique suivra certes son cours, mais elle ne fera pas trop souffrir le secteur.
Comme Nick Hayek, le patron de Swatch Group, Karine Szegedi estime que cette évolution pourrait même présenter des opportunités pour l’horlogerie suisse. «Les jeunes qui, jusqu’ici, ne portaient rien au poignet pourraient commencer par une smartwatch et, par la suite, porter une montre.»
Deloitte affiche une certitude: contrairement à la révolution du quartz, entamée dans les années 1970, l’industrie fait ici face à un autre défi. A l’époque, deux technologies se concurrençaient sur un seul argument de vente: donner l’heure. Désormais, ce sont deux offres différentes qui se font face, écrivent les responsables de l’étude.
Néanmoins, l’optimisme général du secteur est en recul. En 2013, presque deux tiers des personnes interrogées émettaient une opinion positive pour les douze mois suivants. Ils ne sont désormais plus que quatre sur dix. En cause, le ralentissement de la demande chinoise, affectée par la politique de moralisation de la vie publique et politique. Huit sondés sur dix considèrent que cette évolution législative a pesé sur la demande. Et 68% s’attendent à ce que le phénomène se poursuive. Un sentiment qu’est venu confirmer Richemont, mercredi, en présentant l’évolution de ses ventes sur les cinq derniers mois.
Deloitte note par ailleurs un intérêt de plus en plus marqué des horlogers pour les marchés indien et indonésien. Dans les attentes du secteur, le marché nord-américain reste néanmoins largement en tête. A noter toutefois que l’Europe inspire davantage confiance, puisque 44% des sondés s’attendent à y accroître leurs ventes. C’est presque deux fois plus que l’année dernière.
Servan Peca
LE TEMPS
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