|
Internet et le manque de moyens pour lutter contre la contrefaçon horlogère permettent aux imitateurs de prospérer.
Les fausses montres suisses se portent à merveille. Il s’en fabrique même plus que d’authentiques garde-temps helvétiques. En 2013, 29 millions de vrais chronomètres suisses ont été construits, contre 33 millions d’imitations, selon la Fédération horlogère (FH). Le chiffre d’affaires des contrefacteurs pèserait plus d’un milliard de francs, soit 5% de celui de l’industrie horlogère suisse. La majorité des faux vient de Chine. Ceux qui s’écoulent en Europe transitent souvent par Dubaï.
C’est à la FH que revient la tâche de chapeauter la lutte contre ce gigantesque trafic. L’organisation basée à Bienne obtient certes quelques résultats. Sur les 33 millions de pièces fallacieuses en 2013, la FH annonce en avoir fait détruire 1,2 million. A Dubaï, elle a saisi cette année-là 150 000 montres, selon Michel Arnoux, chef du service anticontrefaçons de la FH, contacté par l’ATS. Sur Internet, où se concentre une partie toujours plus importante des trafics, la Fédération a retiré 350 000 annonces frauduleuses l’an dernier.
Face à l’ampleur de ce commerce, ces résultats sont maigres. Aussi ténus que la taille de l’équipe en charge de lutter contre ces trafics: cinq employés y consacrent l’entier de leur temps et quatre juristes s’en occupent partiellement. La plupart des marques helvétiques s’impliquent de leur côté en collaborant avec l’institution faîtière.
«Il serait utopique de croire qu’on peut éradiquer les contrefaçons», confiait récemment le président de la FH, Jean-Daniel Pasche, à la Tribune de Genève. «On cherche plutôt à montrer qu’on lutte pour obliger les contrefacteurs à être moins visibles.» La Fédération dispose de quelques antennes à l’international, elle forme des policiers et des douaniers et mandate des détectives pour repérer les usines de faux.
En ligne, la FH s’active depuis 2004, date de la création d’une unité spéciale entièrement consacrée au Web. Elle bloque des noms de domaines, stoppe des enchères et contraint des sites à fermer. En moyenne, 8000 sites sont régulièrement surveillés. Ce qui ne suffit pas: «Ils rouvrent souvent sous un autre nom, mais au moins ils sont obligés d’être moins visibles», selon Jean-Daniel Pasche.
A ce jeu permanent du chat et de la souris, la branche y perd. Plus de 800 millions de francs par an, selon la FH. Les fausses montres représentent 9% des saisies douanières globales, ce qui en fait le produit le plus contrefait après le textile.
Par Richard Etienne
Tribune de Gèneve |