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La marque s’adapte déjà à la nouvelle donne monétaire. Son patron, Philippe Léopold-Metzger, estime qu’il est trop tôt pour mesurer l’impact de l’envol du franc
La question est inévitable, alors que s’ouvrait lundi le Salon international de la haute horlogerie (SIHH) à Genève. L’effet d’un euro à la parité avec le franc? «Un choc», selon Philippe Léopold-Metzger, le directeur général de Piaget. «Il est trop tôt, le marché reste trop volatil pour déjà évaluer les effets de cette nouvelle envolée du franc», tempère-t-il dans la foulée. Cela n’a pas empêché la marque de réagir, à la suite de l’abandon brutal du taux plancher par la BNS, jeudi dernier. En Europe, ses prix seront relevés de 7 à 8%.
Le franc, lui, a gagné 15% ces derniers jours, et «il ne reviendra pas» à ses niveaux précédents, selon lui. Est-ce à dire que Piaget prend la différence à son compte, qu’elle consent à réduire ses marges? Le patron élude. Et rappelle qu’il ne dispose que d’une marge de manœuvre limitée du côté des dépenses. «Nous pouvons améliorer notre efficacité, mais en aucun cas augmenter la part de coûts en euros», dit-il en substance. En Suisse, Piaget est installée à La Côte-aux-Fées (NE) et à Plan-les-Ouates (GE).
Philippe Léopold-Metzger dit aussi sa conviction dans la capacité de l’industrie horlogère à continuer d’imposer des produits innovants, à demeurer à la pointe du progrès. Et donc, à continuer d’exporter à travers le monde. Même avec un franc si cher. «Il n’y a pas d’équivalent à la montre suisse», rassure-t-il.
En termes géographiques, Piaget, historiquement orientée vers l’Asie, et donc particulièrement exposée au ralentissement des ventes en Chine et à Hongkong, sent le vent tourner. Mais ne s’alarme pas. «Il y a une désaffection sur Hongkong, mais je ne pense pas qu’elle soit structurelle». Liée à la révolte des parapluies ou non, une certaine défiance s’est installée, depuis quelques mois. «Cela concerne surtout les clients plus fortunés», confirme le patron de la marque.
Ou vont-ils, ces riches voyageurs chinois, si friands de haute horlogerie? Au Japon, en Corée du Sud, à Singapour. Autant de destinations nouvellement prisées dans lesquelles Piaget possède déjà des points de vente – elle en inaugurera un nouveau d’envergure à Tokyo cette année.
Au rang des autres projets d’ouverture, Piaget s’installe à São Paulo, à la fin du mois. La rue de la Paix, à Paris, comptera également l’une de ses nouvelles enseignes en 2015. Mais Piaget ne vise pas que les touristes. Elle veut s’adresser aux clients locaux grâce à une gamme de modèles «au positionnement plus agressif». En d’autres termes, moins chers que la moyenne de 20 000 francs environ. Du côté joaillier également, Piaget veut tenter de convaincre un plus large public. La marque, qui a décidé d’augmenter la part de bijoux dans son éventail, va donc proposer des produits dont les premiers prix se situeront autour de 1000 francs.
Des ajustements, mais aussi quelques paris, donc. Pour autant, Piaget, dont le chiffre d’affaires est estimé à 680 millions de francs par la banque Vontobel, ne perd pas de vue ses grands principes. Cette année encore, la marque met en avant la finesse de ses montres.
«Nous avons aussi besoin de consolider les modèles existants», répond Philippe Léopold-Metzger, lorsqu’on lui demande combien de nouveautés sont présentées au SIHH. A son poignet, le patron le prouve. Il porte un modèle Altiplano, la collection emblématique, identitaire même, de la marque. Mais c’est un chronographe, une complication inédite dans cette ligne qui compte 37 mouvements. Avec son mouvement de 4,65 millimètres et son boîtier de 8,24 millimètres d’épaisseur, le modèle bat deux nouveaux records dans le domaine de l’extra-plat, annonce Piaget.
Servan Peca
LE TEMPS
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