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il fut un temps où les marques de montres – qui ne se prenaient pas pour des marques – avaient à coeur de ne pas en rajouter dans le bullshit historique. Un bon exemple à propos de l'invention du mouvement automatique. On sait que la légende d'Abraham Louis Perrelet est née d'une recherche de l'historien suisse Alfred Chapuis, mandaté (c'est-à-dire financé) par Rolex pour donner des lettres de noblesse au mouvement automatique équipé d'un rotor. Rolex tenait – pour des raisons de légitimité évidentes après la Seconde Guerre mondiale – à ce que ce soit une invention suisse. En 1952, Alfred Chapuis a ainsi donné corps à un génial storytelling autour d'Abraham Louis Perrelet, avec une légende qui tiendra un demi-siècle, jusqu'à ce que les recherches d'un autre historien, Joseph Flores, rendent à Hubert Sarton ce qu'on pensait à Perrelet ! L'affaire avait déjà défrayé la chronique dans les années 1930, quand Rolex s'affirmait, par voie pubicitaire, « inventeur du mouvement automatique ». Le site des montres Harwood nous raconte la vraie histoire de l'invention de cette « montre à remontage automatique », brevetée quelques années (1924) avant l'Oyster de Rolex. À l'époque, Rolex avait dû s'excuser et même intégrer l'inventeur John Harwood dans ses publicités (ci-dessous, une publicité de 1956, qui juxtapose la légende Perrelet et l'histoire John Harwood). Imagine-t-on, aujourd'hui, la maison Perrelet faire cohabiter le « mythique » Perrelet et l'historique Hubert Sarton (Business Montres du 23 janvier) ? Pas vraiment ! Sauf que, par une extraordinaire et quasi-cosmique coïncidence historique, cette publicité Rolex est tout aussi fautive que la prétention d'Harwood à inventer la montre automatique, mais elle permet de rendre à... Festina ce qui lui était dénié par la recherche documentaire : la marque qui a créé la première montre-bracelet automatique reste à ce jour la maison Leroy (1922) – une marque du groupe Festina, groupe horloger hispano-suisse qui est également propriétaire de la marque Perrelet... |