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L’horloger genevois Badollet part à la recherche de ses racines
 
Le 08-01-2008

C'est un peu comme un objet de curiosité que l’on regarde la jeune so­ciété Badollet. Normal: la mar­que horlogère vient à peine d’être créée à Genève, terrain de jeu privilégié des plus grandes ma­nufactures du monde, et affirme son ambition de s’ancrer sur leur segment d’activité, le très haut de gamme. Diantre! La stratégie est audacieuse, diront certains. De l’inconscience pure, rétorqueront les pessimistes.
Et pourtant. Partie à la recher­che de son incroyable passé hor­loger – au 18-19e siècle, Jean-Jac­ques Badollet travailla rue de Thionville aux côtés de grands noms tels que Lépine et Breguet – la marque genevoise suscite déjà un vif intérêt des spécialis­tes du secteur. Ce, alors que les premiers modèles ne sortiront que fin février.
Pour Aldo Magada, CEO de Badollet, le risque est donc cal­culé. Face à l’émergence de la multitude de marques fashion qui ont envahi le marché de l’horlogerie ces dernières années, la société qu’il dirige a même de grandes chances de se distinguer. «L’horlogerie, c’est un vrai mé­tier. Pour s’imposer, il faut une légitimité», souligne-t-il.

Sans oublier une certaine pas­sion. Familier de l’industrie du luxe – l’homme a notamment exercé ses talents de manager chez Piaget, Omega, Ebel, Gucci ou encore Reuge –, Aldo Magada espère conquérir les collection­neurs avec une stratégie basée sur la vraie exclusivité. Interview.

Pourquoi créer une marque horlo­gère dans cet environnement si concurrentiel?
J’ai été contacté par un groupe d’investisseurs allemands actifs dans le domaine de la finance mais passionnés d’horlogerie. Certains d’entre eux sont des collectionneurs avertis. Ils sou­haitaient réagir à l’arrivée de toutes ces marques opportunis­tes sur le marché de l’horlogerie. Cette situation entraîne un ap­pauvrissement du secteur.

Comment?
Il n’y a plus de véritable déve­loppement de produits. Certains s’imaginent qu’il suffit de mettre un nom sur cadran pour devenir horloger. Mais on ne devient pas Federer en commençant le tennis à 20 ans! Il y a donc encore de la place pour ceux qui se tournent plus vers l’horlogerie que l’op­portunité financière. Nous ne voulons pas créer des montres spectaculaires, mais une entre­prise pérenne.

Comment avez-vous connu Badollet?
Nous souhaitions reprendre un nom jouissant de fortes raci­nes horlogères. L’un de nos inves­tisseurs a fait la connaissance d’un héritier de la famille gene­voise Badollet. Nous avons dé­couvert une dynastie d’horlogers qui, de père en fils, ont suivi l’aventure du garde-temps de fa­çon ininterrompue pendant 300 ans, jusqu’en 1924. Nous avons alors commencé un travail historique.

Pourquoi?
Cela fait partie de notre philo­sophie. Badollet a travaillé avec les plus grands sans jamais re­nier leurs traditions. Ce patri­moine représente nos valeurs. Nous avons ainsi retracé le passé de la marque avec l’aide de l’ Uni­versité de Genève et du Musée de l’ Horlogerie.

Quelles sont ces valeurs?
Un esprit typiquement gene­vois, empreint de discrétion et de calvinisme. A Genève, le luxe n’est pas le superflu. La réflexion est plus confidentielle. Sans tape­à- l’oeil.

Votre positionnement s’affirme sur le très haut de gamme. Comment comptez-vous faire la différence?
En affirmant notre volonté de poursuivre le développement de produits néoclassiques, mais très performants. L’utilisation des nouveaux matériaux très en vo­gue actuellement ne sera envisa­gée que pour renforcer la techni­cité de nos montres. L’un de nos modèles possédera par exemple une platine en météorite, mais l’objectif n’est pas d’être dans la tendance. La météorite est un matériau difficile à travailler. Une notion d’exclusivité appré­ciée par les collectionneurs.

Quelle part de marché comptez­vous conquérir?
On estime actuellement à en­viron 900 millions le marché de l’horlogerie très haut de gamme, et son potentiel est en croissance. Nous espérons d’ici 5 à 7 ans gagner 10% de ce segment.

Est-ce à dire qu’en 2015, Badollet aura sa propre manufacture?

Avant de penser production, nous espérons d’abord obtenir la maîtrise technique. En Suisse, l’horlogerie est faite d’un réseau formidable de PME. C’est cela aussi que nous voulons revendi­quer.

Tribune de Genève / Florence Noël

 



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