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Rachetée par LVMH (Louis Vuitton - Moët Hennessy), la marque de Jean-Claude Biver doit atteindre le demi-milliard de chiffre d'affaires d'ici à cinq ans.
C'est un Big Bang dans le ciel horloger suisse. Le biplan Hublot rejoint les Zenith et autres TAG Heuer dans l'A380 de LVMH. Mais Jean-Claude Biver, l'emblématique capitaine de la société, reste aux commandes, lui qui se plaisait à raconter dans ces colonnes qu'il appréciait les petits avions après avoir piloté des gros-porteurs, référence à son passage chez Swatch. Biver et Hublot, le vol peut se résumer à deux chiffres: 29 millions et 152 millions. Soit les ventes de la marque à son arrivée en 2004 et l'an dernier. Hublot, c'est aussi une ligne qui rapporte. La marque affiche une marge opérationnelle de 20%. Elle est plus rentable même que le pôle horloger du géant mondial du luxe (17%). Et, pour la petite histoire de gros sous, LVMH a négocié la société au prix de deux fois son chiffre d'affaires attendu cette année ou douze fois ses résultats opérationnels. Soit aux alentours de 500 millions de francs.
La patte de l'alchimiste
Hublot, ce n'est pas un de ces magnifiques vieux coucous que l'on a dépoussiéré au lendemain de la crise des années 70. Hublot s'est envolé de l'esprit de Carlo Crocco au début des années 80. Alors que les Swatch n'avaient pas encore redonné des ailes à l'horlogerie suisse. Alors que Jean-Claude Biver n'avait pas encore racheté Blancpain. Dès son lancement, la marque a jonglé avec les termes d'innovation, de tradition, de matériaux, de l'or au caoutchouc. Le tout résumé en un concept, «l'art de la fusion», son ADN, a-t-il été rappelé hier. Il a fallu cependant une main de maître, l'intervention d'un alchimiste pour que la fusion s'impose sur les poignets de la jet-set et autres passionnés de garde-temps.
Hublot a ainsi assuré son envol dès 2004. Dès l'arrivée de celui qui venait de relancer Blancpain. Un homme tout en mouvement qui s'est arrêté un jour à la vallée de Joux pour mieux en repartir; pour mieux aller vendre ce coin de pays et son savoir-faire dans les palaces ou les foires. Et pas seulement. S'il est ainsi logique de voir les trotteuses s'étaler sur les voiles des formules 1 des mers (Hublot s'est associé aux Italiens de Luna Rossa pour la Coupe de l'America 2007), il est plus rare de voir les chantres du luxe communiquer sur les terrains de foot. Et Hublot, c'est l'Euro 2008.
Galons du capitaine compris
Quel plan de vol suivra Hublot sous la bannière LVMH? Philippe Pascal, patron du pôle montre et joaillerie du géant français, le promet, il disposera d'une grande autonomie. Car dans le prix d'achat sont compris les galons du capitaine. «Hublot était un cas à part dans l'univers horloger indépendant, notamment grâce à la présence de Jean-Claude Biver», confirme Alessandro Migliorini analyste de Helvea. Hublot n'est autre qu'une «rising star, une étoile montante» rejoignant la galaxie d'un groupe qui a dû laisser filer au tournant du siècle d'autres étoiles parties briller dans le ciel de Richemont Jaeger-LeCoultre et autres IWC. Philippe Pascal parle encore de complémentarité avec les autres vedettes du groupe tant en termes géographiques que de segment de marché. «Hublot complète effectivement le portefeuille de LVMH, constate Alessandro Migliorini. C'est une marque différente, qui rencontre un grand succès dans les pays émergents. Elle a notamment un grand potentiel de développement en Chine.» Un élément à ne pas négliger alors que les firmes du luxe encaissent une baisse de leurs ventes sur les marchés dits matures.
Deux gagnants
La fusion d'hier valorise en fait ses deux composantes. Pour l'analyste de Helvea, Hublot a aussi beaucoup à gagner de cette entrée dans un grand groupe. Surtout lorsqu'il s'agit de croître encore. «Hublot doit une grande partie de sa croissance à la gamme Big Bang. Elle se doit d'élargir désormais sa collection.» Les objectifs sont clairs: un demi-milliard de chiffre d'affaires d'ici à cinq ans. Comme le disait récemment Jean-Claude Biver, lorsque l'on parvient au sommet, il faut encore grimper. LVMH sert ses ambitions. Il l'a d'ailleurs choisi. Le groupe est en effet réputé pour exploiter à merveille le potentiel de ses marques ainsi que les synergies entre ses différents pôles, ses différentes manufactures. Synergies avec LVMH? Jean-Claude Biver peut en rêver différemment. Lui, l'amateur de Château d'Yquem.
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