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Karl-Friedrich Scheufele, coprésident du groupe genevois, explique pourquoi il investit 15millions de francs à Fleurier (NE). La crise ne remet aucunement en cause ce projet, même si un tassement du secteur est anticipé.
Le Temps: Vous avez annoncé récemment la fondation d'une nouvelle société, Fleurier Ebauches, dans le canton de Neuchâtel. Quand sera-t-elle opérationnelle?
Karl-Friedrich Scheufele: Dès le mois de décembre. Une petite équipe y travaille déjà. Nous allons investir dans un premier temps environ 15 millions de francs dans la rénovation du bâtiment industriel, acheté l'an dernier et qui abritera cette fabrique d'ébauches de mouvements et de composants horlogers, ainsi que dans l'achat de machines. Les travaux seront échelonnés sur deux à trois ans. A cette échéance, Fleurier Ebauches occupera une cinquantaine d'employés. Notre démarche s'inscrit dans la suite logique de la fondation de Chopard Manufacture en 1996. Cette société jouxte Fleurier Ebauches et compte aujourd'hui 160 employés.
- Qu'est-ce qui distingue les deux filiales?
- Chopard Manufacture produit des mouvements haut de gamme, qui sont pour l'instant uniquement destinés à nos collections L.U.C. Nous nous sommes rendu compte que nous devions accroître notre production de mouvements «maison» afin de faire face à la hausse du nombre de montres fabriquées. Pour ce faire, il fallait plus de place, plus de machines et travailler de manière plus industrielle. Il faut se rendre compte que l'offre de mouvements ne suit actuellement pas la demande, qui est restée jusqu'ici très vive. En verticalisant notre production, nous nous assurons la fourniture des ébauches.
- Songez-vous à des rachats de sous-traitants?
- Nous préférons la voie organique.
- Combien de montres avez-vous produites l'an dernier?
- Environ 75 000 pièces sont sorties de nos ateliers horlogers en 2007. L'horlogerie représente 60% du chiffre d'affaires de Chopard, et la joaillerie (75 000 pièces également) 40%. Notre chiffre d'affaires 2007 est bien supérieur à 800 millions de francs (ndlr: à comparer avec 720 millions de francs en 2006. Cette année, les ventes sont en hausse, mais Chopard ne donne pas de taux de progression).
- La crise financière prend des dimensions mondiales. En ressentez-vous des effets?
- Nous observons un ralentissement aux Etats-Unis. Certains détaillants nous demandent notamment de ralentir nos livraisons. Mais pour l'instant, il s'agit du seul marché qui subisse un réel impact.
- Quelles sont vos attentes pour 2009?
- Il y a très peu de visibilité, mais il est clair que nous anticipons un tassement dans notre secteur. Reste que l'ampleur de ce phénomène reste très difficile à estimer à l'heure actuelle. Cela nous incite à nous montrer très prudents. En clair, les investissements qui ne sont pas absolument indispensables sont revus, mais cela ne concernera certainement pas la partie horlogère à Fleurier. Nous devons constamment agir dans l'intérêt de l'ensemble du groupe Chopard, qui regroupe près de 1800 collaborateurs dans le monde, dont plus de 700 à Meyrin (GE).
- Pensez-vous que les pays émergents permettront de compenser la baisse de l'activité en Europe et aux Etats-Unis?
- L'horlogerie de luxe dispose aujourd'hui d'une clientèle beaucoup mieux diversifiée géographiquement qu'il y a encore une quinzaine d'années. Le Vieux Continent et les Etats-Unis étaient alors clairement les principaux marchés, suivis assez loin derrière par l'Asie. La situation a beaucoup changé. Le groupe est aujourd'hui très bien représenté en Asie et en Europe de l'Est. Notre situation est mieux équilibrée.
Philippe Gumy Le Temps
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