Les diamants se volent à la pelle
 
Le 29-01-2009

Envolée des casses de bijouteries en 2008. Certains, très audacieux, pourraient être l’œuvre de gangsters venus de l’Est.

Casses et vols de bijoux, tous plus fulgurants et audacieux les uns que les autres, ont atteint des sommets l’année 2008. L’attaque en tous genres de bijouteries devient un sport national et international, partagé par des tas d’équipes pistées par la police judiciaire.

C’est aux basques d’Estoniens que se trouve la brigade de répression du banditisme (BRB) depuis le vol de montres de luxe dans une bijouterie de la rue de Rivoli, à Paris, le 19 décembre. Deux hommes armés ont donné un coup de crosse à l’un des membres du personnel pour l’obliger à ouvrir le sas. Une fois à l’intérieur de la bijouterie, ils ont fait main basse sur les montres Cartier, Chaumet, Rolex et Chopard exposées dans les trois vitrines. Pour 400 000 à 500 000 euros de butin. Les deux braqueurs, vêtus de longs manteaux et de casquettes de trappeurs, ont pris la fuite au pas de course, avant de s’engouffrer dans la bouche de métro Concorde. D’après les deux victimes, ces voleurs étaient du «type européen de l’Est». La BRB y voit la patte d’un gang d’Estoniens qui, selon le fichier d’analyse d’Europol, a la particularité de «cumuler les vols de bijoux et le trafic de stups, de pratiquer les deux de façon interchangeable».

C’est probablement «une équipe française» qui a raflé 85 millions d’euros à la joaillerie de luxe américaine Harry Winston, à Paris, le 5 décembre. C’est le vol le plus important toutes catégories jamais commis en France. Les braqueurs étaient si bien renseignés qu’ils connaissaient les prénoms et les adresses des employés, et l’emplacement exact des coffres-forts. Cela laisse supposer des repérages très poussés de cette bijouterie sise avenue Montaigne. Ce fut le remake - en quinze minutes au lieu de vingt - d’un hold-up dans la même boutique quatorze mois plus tôt. Selon un enquêteur, «les braqueurs parlaient français et non pas slave ou avec un accent slave comme cela a été écrit».

«Pink Panther». La brigade de répression du banditisme piste donc «une équipe traditionnelle» et non pas le gang serbo-croate des «Panthères roses» qui dévalise depuis cinq ans les joailleries du monde entier, y compris en France. La police britannique de Scotland Yard les a baptisés The Pink Panther après le vol à Londres en mai 2003 de 13 millions d’euros de pierres à la célèbre bijouterie Graff du quartier Mayfair. Car une bague sertie d’un diamant bleu à 600 000 euros avait été découverte par la suite planquée dans un pot de crème de beauté comme dans le film de Blake Edwards. Interpol englobe désormais sous ce nom «150 à 200 malfaiteurs venus de Serbie, de Croatie et du Monténégro ayant commis 90 vols à main armée dans 19 pays pour un butin de 100 millions d’euros». Selon un enquêteur français de l’antigang, «ces anciens militaires ou miliciens de l’ex-Yougoslavie, peut-être même d’ex-policiers des unités d’élite, très organisés, préparent savamment leurs coups en amont, et font des agressions éclairs. Les Panthères roses attaquent à 2 000 km à l’heure et repartent aussitôt dans leurs pays, sans se faire flasher, ce sont les Go Fast du braquage de bijoux».

Trois Serbes des Panthères roses ont été jugés en décembre en Savoie pour cinq braquages de bijoux évalués à 7,5 millions d’euros commis à Biarritz, Cannes, Saint-Tropez et Courchevel. Dans cette station de ski, ils ont attaqué la bijouterie Doux le 31 janvier 2003, «saucissonné» les deux vendeuses, ont raflé pour 1,4 million de montres et de bijoux en dix minutes puis ont disparu dans la neige. Mais Dragan Mikic, l’un des braqueurs, a été rattrapé le lendemain à la gare d’Albertville. Il a toutefois filé de la prison de Villefranche-sur-Saône en 2005. Les Panthères roses ont la réputation de préparer leurs coups au millimètre et de se fondre dans n’importe quel paysage : «Ils sont capables d’attaquer à Dubaï une bijouterie dans un centre en marbre avec deux voitures béliers ou de voler des bijoux au Japon cachés derrière des parapluies et des masques, comme en 2007, ou de taper à Saint-Tropez comme l’été 2005 avec des bobs sur la tête et de repartir en hors-bord», explique un enquêteur de l’office central de lutte contre le crime organisé (OCLCO) qui piste «ces différentes équipes venues des Balkans» et labellisées Pink Panther.

Enfin, la PJ traque une incroyable «voleuse par ruse» suspectée d’avoir escamoté une bague à 635 000 euros chez Cartier à Paris le 20 novembre. Venue soi-disant du Qatar avec son fils, la dame corpulente qui porte un foulard et des lunettes a remplacé en un tour de main de maître la bague sertie d’un diamant de 5,5 carats par une réplique Burma à 1 000 euros. La police a identifié la voleuse - captée par des caméras - mais cette Franco-Libanaise de 55 ans a su s’escamoter aussi sûrement que le diamant de chez Cartier.

P.T. - Liberation

 

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