Le directeur d’Audemars-Piguet revient sur sa stratégie globale
 
Le 19-04-2007

Féminisation, sponsoring et développement vert. C’est en résumé l’actualité de la marque bientôt plus connue pour sa présence sur la coque du défi Alinghi que pour sa célébrissime Royal Oak. Les premières joutes ont été courues, pour le patron de la marque horlogère, c’est l’occasion d’une nouvelle célébration, celle de la sortie du modèle Alinghi en carbone forgé. «La première montre réellement portée sur l’eau par Ernesto Bertarelli.» Un succès d’estime dû à la légèreté du matériau, qui «rend la montre inoffensive pour les coéquipiers», précise le directeur. La marque soutenait déjà le team romand à Auckland. Pour rester en course, il a fallu faire un effort. «Les francs sont devenus des euros», image l’horloger. Et si la Coupe de l’America gagne des sommets de popularité, les produits Audemars-Piguet conservent toute leur exclusivité. Les livraisons des garde-temps se faisant toujours avec un temps de retard. La pénurie toucherait même près de 40% des commandes, au-delà des 25% que le patron décrit comme souhaitable pour maintenir l’effet de rareté. Un mal nécessaire à maintenir la valeur des produits. Et malgré les retards de livraison, il se refuse à toute souscription, une pratique toujours plus commune. La pénurie ne touche pas encore la part féminine de la marque. Depuis plusieurs années, Audemars-Piguet tente une percée auprès des dames, avec une gamme de bijoux développés en interne et quelques modèles de montres à complication. Le marché reste encore à conquérir.

Les commandes doivent être anticipées

Sur le stand genevois, c’est la cohue. On s’arrache les minutes avec le directeur, qui jongle avec les modèles de démonstration et les langues étrangères. La marque, l’une des rares indépendantes, est présente à Genève au côté des fleurons de Richemont depuis 1999. Georges-Henri Meylan fait même partie du comité des exposants, ainsi que Luigi Macaluso, directeur de Girard-Perregaux (lire ci-contre). En termes d’affaires, le salon est plus une formalité qu’un moment clé. «Si on attend le salon pour lancer les commandes, il est déjà trop tard», appuie-t-il. A Palexpo, l’animation est joyeuse, Georges-Henri Meylan aussi, malgré le regret de voir ses garde-temps à plusieurs centaines de milliers de francs maniés comme des tocantes juste bonne pour la révision après le salon.

Les ventes ont doublé en trois ans

Côté entreprise, le directeur est plus que serein. En trois ans, le chiffre d’affaires à doublé. En 2006, Audemars-Piguet a vendu pour plus de 400 millions, avec 25.500 montres écoulées. Un résultat en progression de 25% par rapport à l’exercice précédent. Il table cette année sur 27.500 unités. La croissance est essentiellement affaire de territoire. La marque s’est imposée sur tous les marchés, émergents ou non. Les Etats-Unis constituent son plus important débouché en termes de revenus, Hong Kong remportant la palme en matière de volumes. Comme la plupart des marques haut de gamme, le pas des boutiques maison a été pris et bien pris. La stratégie s’est accompagnée d’une réduction de la voilure de près d’un quart des points de vente. Quinze boutiques en nom propre sont aujourd’hui actives dans le monde. Un important projet est en cours à Tokyo, où l’horloger s’apprête à ouvrir un centre administratif dans un bâtiment de neuf étages, à deux pas du fief de Swatch Group. Une autre opération est en cours en Russie, où la croissance est la plus forte. Et l’entrepreneur de justifier: «Il y a 25 ans, les montres quittaient le Brassus et cela suffisait. Mais c’est comme ça que les problèmes surviennent. Aujourd’hui, il est indispensable de maîtriser toutes les étapes.»

Au Brassus justement, c’est le chantier. 35 millions ont été investis dans un nouveau bâtiment, qui permettra de regrouper toutes les unités de production aujourd’hui dispersées dans le village combier. Un projet porté par l’une des préoccupations les moins visibles de l’entreprise, qui s’adonne depuis plusieurs années au développement durable via une fondation. L’édifice doublera la surface de travail actuelle et sera donc estampillé Minergie. Il fera le pont avec l’ancien atelier d’AP Technologies, bras armé de l’ex-division medtech aujourd’hui dans le giron de la holding Valtronic Technologies. Une passerelle reliera comme un cordon ombilical les deux corps de bâtiment, et au milieu coulera la rivière, remise dans son lit pour l’occasion.

Agefi

 

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