SWATCH GROUP: L’industriel contre la finance bricoleuse
 
Le 19-03-2009

Pour la présentation des résultats 2008, Nick Hayek a tenu à souligner où sont les vrais créateurs de croissance: dans l’économie réelle.

Un sweat-shirt gris, genre université américaine, une montre à chaque poignet, gouailleur et militant, Nick Hayek Jr a fait un crochet par Genève pour présenter le bilan définitif de Swatch Group en 2008. A la Cité du Temps, il était accompagné de la quasi-totalité de la direction.

 Et ce fut hier une nouvelle occasion pour lui de rappeler la vraie nature de son métier: industriel. Et si certains ne l’avaient pas encore compris, il leur a conseillé de jeter un coup d’œil sur la page de garde du rapport général au milieu de laquelle trône un avertissement: «Attention! Cette publication n’est pas recommandée aux acrobates et jongleurs du cirque financier actuel.»

Second meilleur bénéfice net

Nick a sans doute peu goûté que la Bourse suisse sanctionne le titre du Swatch Group (–4,4% en fin de séance) le 12 mars dernier quand ce dernier a publié un bénéfice en baisse de 17,4%, à 838 millions de francs. «C’est le deuxième meilleur résultat historique de notre groupe.

Quant au chiffre d’affaires, il a tout de même augmenté de 4,3% pour s’établir à 5,96 milliards de francs. Je ne connais pas beaucoup de groupes qui peuvent s’enorgueillir de tels résultats dans la situation actuelle.»

Selon Hayek fils, le groupe aurait pu s’attendre à pire sans certaines stratégies maison. «Nous n’avons pas, comme d’autres, augmenté nos prix pour faire face à la chute des volumes. En outre, notre groupe peut s’enorgueillir d’être présent sur tous les segments. Et nous croyons depuis toujours à l’importance du bas et du milieu de gamme.» Et comme pour mieux illustrer son propos, Nick Hayek a profité de l’occasion pour présenter deux nouveaux mouvements préparés à l’interne par ETA et destinés au milieu et bas de gamme. «Pendant que d’autres font de l’horlogerie en pariant seulement sur le marketing et le design, nous soutenons depuis toujours ce secteur en participant aux innovations qui permettent à la Suisse de garder son avance.»

Lutter contre le franc fort

Une fois encore, l’industriel a parlé. Un industriel qui peut se vanter d’avoir une vue sur toute la chaîne qui aboutit au consommateur final.

Après tout, Swatch Group réalise aujourd’hui plus de 35% de son chiffre d’affaires grâce à son propre réseau de distribution. «C’est pour cela que nous savons mieux que quiconque comment réagit le consommateur et comment adapter notre production en conséquence. Nous ne cédons pas à la panique comme certaines marques horlogères, qui sont de nos clients, et qui ont parfois gelé leurs commandes pour plusieurs mois de crainte de détenir des stocks. Notre modèle industriel intégré est de ceux qui devraient s’imposer au sortir de la crise. Ceux qui, pour diluer le risque, ont trop recouru à la sous-traitance se sont à mon avis fourvoyés. Surtout si leur produit n’était pas irréprochable.»

Le patron de Swatch Group n’a pas non plus fait l’impasse sur la question d’un franc suisse fort. «C’est ce qui explique une partie de nos résultats. Nous avons beaucoup souffert des taux de change. Et nous saluons la politique actuelle de la Banque nationale suisse qui tente de tout faire pour soulager notre industrie exportatrice ainsi que notre tourisme. Et si la pression des changes se relâche, nous n’excluons pas d’afficher de meilleurs résultats en 2009 qu’en 2008.»



--------------------------------------------------------------------------------

Le groupe continue à engager

Résultats affectés par les taux de change
Outre une baisse des ventes sur les marchés horlogers, le groupe a souffert des effets de change en 2008, particulièrement dans la seconde moitié de l’année. La perte induite se monte à 233 millions de francs.

Pas d’arrêt des engagements
Nick Hayek a bien insisté sur ce point hier. Swatch Group n’a l’intention ni de renoncer aux investissements ni de mettre un frein aux engagements. Quelques exceptions tout de même. Micro Crystal, qui développe des quartz pour les téléphones portables, a subi l’érosion nette des ventes dans ce secteur. S’en est suivie une mise au chômage partiel. «Mais cette mesure est déjà un vieux souvenir, car la demande de la part des constructeurs redémarre.» La convalescence sera sans doute plus longue pour l’entreprise Renata qui tire une bonne partie de ses revenus de l’industrie automobile, aujourd’hui sévèrement touchée par la crise.

Destination Chine
A l’heure où la demande des Etats-Unis pour les produits horlogers se révèle plus anémique que jamais, Swatch Group parie toujours plus sur
la Chine. Ce ne sont pas moins de 100 millions qu’il a investi pour permettre à Omega d’être le chronométreur officiel des Jeux olympiques. Et il s’apprête à commencer la rénovation du plus vieil hôtel de Chine pour le transformer en résidence d’artistes et lieu de vente.

Tribune de Genève
Pierre-Yves Frei




 

Copyright © 2006 - 2025 SOJH® All Rights Reserved