Les jeunes marques luttent pour survivre
 
Le 02-04-2009

Malgré les énormes incertitudes économiques actuelles, l’horlogerie helvétique continue à grouiller de projets. Pas seulement dans les maisons. Alors qu’ils avaient lancé leurs affaires ex nihilo il y a un an ou deux, à une époque euphorique, certains passionnés se retrouvent aujourd’hui confrontés à une situation qui soumet leurs modèles d’affaires aux pires conditions possibles.

La marque Lionel Ladoire, du nom de son fondateur, un Français issu du monde de la joaillerie, fait partie de ces audacieux. Née en août 2007, la société est établie à Genève et compte trois collaborateurs. Présente pour la première fois à Bâle cette année (dans un stand hors Baselworld), elle livrera tout prochainement ses premières pièces, dont l’entrée de prix est à plus de 100 000 francs. «Nous avons pour objectif de produire 60 pièces cette année», explique Richard Piras, directeur de la société. Ses montres sont dotées d’un mouvement original, fait sur mesure. «L’intérêt pour notre produit est là. Reste maintenant à voir si les détaillants sont en mesure de nous acheter des pièces. Ils ont globalement tous de gros problèmes de financement de leurs stocks», détaille Richard Piras. Grâce à sa toute petite structure, la société s’estime en mesure de résister, d’autant que la reprise pourrait intervenir dès la fin de l’année, espère le directeur.

Avec ses 22 collaborateurs, la société chaux-de-fonnière Schwarz Etienne doit davantage jongler pour mener ses projets. Sa fondation remonte certes à 1902, mais elle a entamé un virage à 180 degrés il n’y a que deux ans. Un virage qui doit en faire un horloger labellisé «socialement responsable». «Nous voulons que la totalité de nos montres soient conçues et fabriquées en Suisse», explique le directeur, Marc Barrachina, dans son stand bâlois situé lui aussi hors Baselworld. En à peine 18 mois, son équipe a conçu et fait développer un mouvement autonome, dont elle équipera un modèle disponible dès cet automne. Le but: produire 2000 pièces par an. Si tout se passe bien, le personnel pourrait doubler d’ici à un an. «Mais il est vrai que nous sommes totalement pris à contre-pied par la crise. Nous avions démarré alors que tout allait bien. Il n’est pas exclu que nous devions repousser nos projets», ajoute-t-il. L’entreprise a en revanche taillé dans ses charges et devrait tenir le coup.

Tout le monde n’a pas les mêmes soucis. Chez les Maîtres du Temps, marque basée à La Chaux-de-Fonds et fondée l’an dernier par Steven Holtzman, un riche Américain passionné actif dans la distribution de montres, ce ne sont apparemment pas les fonds qui manquent. La petite société s’est ainsi assuré la collaboration de l’horloger Roger Dubuis et de Christophe Claret pour son premier modèle, la Chapter One, présentée l’an dernier. Une montre à 400 000 dollars. Cette année, la Chapter Two bénéficie de la collaboration d’un autre nom célèbre, Daniel Roth. Son prix sera «plus accessible»: 75 000 dollars, explique Walter Ribaga, un directeur plutôt confiant. «Pour l’instant, chaque montre livrée a été écoulée dans les deux jours.» Reste qu’il faut encore les livrer. Walter Ribaga reconnaît que les détaillants réfléchissent à deux fois avant de passer commande. «Mais le potentiel est là, les clients riches ont toujours les moyens de se faire plaisir», conclut-il.

Philippe Gumy
Le Temps

 

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