Fabergé, le bijoutier des tsars, se relance à Genève
 
Le 16-09-2009

Le bijoutier, qui a disparu lors de la Révolution russe, est remis sur les rails après un demi-siècle d’une mauvaise utilisation de son nom. La Cité de Calvin constitue sa base

Fabergé, la mythique maison de joaillerie des tsars, revient. Ou du moins, c’est ce qu’espèrent ses nouveaux actionnaires, qui viennent de relancer cette marque aussi connue que reléguée aux livres d’histoire.

Fabergé (re)devient une entreprise de bijoux de très haut luxe. Seules 100 pièces, toutes uniques, sont en vente. Leur prix: autour de 150 000 francs, avec un pic à 7 millions de francs. Pas question pour l’instant de refaire les fameux œufs, l’idée étant d’apporter une image contemporaine à la marque.

Pas d’œuf, mais une image contemporaine

Derrière ce pari se trouve Pallinghurst, un fonds de «private equity» qui a été lancé par le Sud-Africain Brian Gilbertson, l’ancien patron de la compagnie minière BHP Billiton. «L’idée a émergé en 2005, explique-t-il. Nous nous sommes dit que d’utiliser une marque permettrait de mieux vendre nos diamants. Or, l’héritage de Fabergé était gaspillé.»

C’est ainsi qu’il a entrepris de mettre la main sur ce nom prestigieux. Mais depuis 1917, quand la famille a fui la Révolution russe, la marque a été utilisée pour tout et n’importe quoi.

Dans les années 1950, un homme d’affaires américain a commencé à l’utiliser à son propre compte, et la famille – pour des raisons financières – a dû accepter de lui laisser ce droit pour une somme dérisoire. C’est ainsi que se sont développés les parfums «Brut de Fabergé». Depuis 1989, c’est d’ailleurs Unilever qui possédait la marque.

Dérivés supprimés

En 2007, Pallinghurst lui a racheté la marque, pour un prix qui demeure secret. Pendant dix-huit mois, toutes les licences des produits dérivés ont été retirées, des parfums jusqu’aux cravates. L’investisseur a aussi réuni la marque à la famille, en faisant venir Tatiana Fabergé, l’arrière-petite-fille de Peter Carl, le bijoutier qui a rendu la maison célèbre. Un artiste bijoutier parisien, Frédéric Zaavy, connu pour ses œuvres frôlant la sculpture, a aussi été recruté.

Reste le plus dur, à savoir trouver un modèle d’entreprise financièrement viable. Or, malgré ses hautes ambitions, Fabergé n’a pas les moyens de créer de toutes pièces un réseau de boutiques internationales. La réponse peut paraître paradoxale pour une marque de luxe: Internet.

Un site web permet de consulter les pièces à très haute résolution, et autorise un dialogue direct avec les vendeurs, qui sont basés à Genève (la direction est à Londres et l’atelier de création à Paris). Pas question de faire du e-commerce, bien sûr. Les vendeurs se déplacent à domicile. Le site internet, auquel s’ajoutera à partir de novembre un «salon» visitable sur rendez-vous dans la Cité de Calvin, n’est que le premier point de contact.

Une très petite clientèle recherchée

«Je serai content si d’ici un an nous avons 30 à 40 clients, qui nous passent des commandes régulières», estime Mark Dunhill, le directeur général de Fabergé. Une façon de souligner qu’il ne vise qu’une très petite clientèle, et que rétablir la notoriété de la marque est un pari de long terme, hautement risqué.
Eric Albert

Le Temps

 

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