Fabian Krone a quitté son poste de CEO de la marque Lange & Söhne. Mandat prolongé pour Norbert Platt.

Nouvelle défection au sein du groupe de luxe Richemont. Après la démission du CEO de Baume & Mercier, c’est au tour de celui de la marque Lange & Söhne de partir. Fabian Krone a démissionné du poste qu’il occupait depuis 2004 en raison de divergences de vues sur la stratégie. Jerzy Schaper, actuel COO de l’horloger allemand basé à Glashütte (Saxe), le remplace de manière intérimaire. En quelques jours, deux hauts dirigeants du numéro deux mondial du luxe ont donc décidé de quitter l’entreprise.

Ces démissions, pour des motifs similaires, étaient attendues dans la mesure où les deux marques avaient été mises sous la tutelle de deux autres CEO de sociétés du groupe. Ainsi, outre son poste de directeur général de la manufacture Jaeger-LeCoultre, Jérôme Lambert s’occupe désormais aussi de Lange & Söhne, alors que Georges Kern, DG d’IWC, a pris la responsabilité de Baume & Mercier et Roger Dubuis depuis juillet. Dans ces conditions, les deux démissionnaires ont pu interpréter cette décision comme une sanction ou un désaveu de la part de Richemont et en ont tiré les conclusions qui s’imposaient. Mais avaient-ils vraiment le choix dans ce contexte bridé? Le CEO de Roger Dubuis va-t-il les imiter?

«A priori, cette valse des dirigeants ne donne pas une impression de la plus grande sérénité de la part du groupe. Il convient toutefois de relativiser et de l’interpréter plutôt de manière positive. Comme s’il s’agissait d’un nouveau départ. Georges Kern et Jérôme Lambert ont désormais les coudées franches pour imposer leur style et leurs décisions», explique un insider.

Ces réorganisations suggèrent par ailleurs que ces trois marques souffrent davantage de la crise que l’ensemble du groupe, lui-même n’étant pas épargné mais résistant mieux que LVMH ou Bulgari. Même si le groupe ne publie pas de chiffres par marque, il n’avait cependant pas caché les difficultés rencontrées par exemple par Baume & Mercier. En mai, Richard Lepeu, CFO de Richemont, avait déclaré que la marque genevoise, fondée en 1830, étaient une des deux entités du groupe performant le moins bien en termes de profitabilité. Au niveau du groupe, Richemont a essuyé un recul de son chiffre d’affaires de 16% durant les cinq premiers mois de l’année commerciale 2009-2010. En monnaies locales, la contraction s’est même affichée à 21%. Le secteur des montres, qui a subi ces deux démissions et comprenant encore Piaget, Vacheron Constantin et Panerai, a essuyé un recul de 18%. Il s’agit là bien sûr d’une moyenne.

Avec Georges Kern et Jérôme Lambert, les deux marques sont entre d’excellentes mains. Les deux hommes ont su faire de leurs maisons respectives des références indiscutables dans leur domaine, les portant plus haut encore ces dernières années. A eux désormais de relancer les deux marques endormies, de les repositionner et de leur donner de l’allant marketing. Georges Kern et Jérôme Lambert consolident leurs positions au sein de la constellation du groupe basé à Bellevue (GE). A tel point que certains observateurs voient l’un ou l’autre comme éventuel successeur de l’actuel CEO du groupe Norbert Platt, qui part à la retraite à fin mars 2010. Le CFO Richard Lepeu ferait aussi partie des grands favoris. Richemont a déclaré hier qu’il s’exprimerait en temps utile sur cette succession, alors que le départ du CEO remonte à fin mai. Autre hypothèse, le président Johann Rupert pourrait assurer l’intérim jusqu’à ce que les nuages de la crise conjoncturelle se soient dissipés. C’est ce qu’il avait fait avant l’arrivée de Norbert Platt il y a cinq ans.

Parmi les autres chantiers de Richemont figure celui de la marque Montegrappa. Cette entreprise, active dans les instruments d’écritures, ne fait plus partie du périmètre du groupe. Lequel cherche activement à vendre la société. Il ne s’agit toutefois pas du meilleur timing pour retirer un bon prix de cette cession, même s’il n’y a aucune urgence à s’en défaire.
Bastien Buss

AGEFI