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Au cœur du quartier latin, un magasin de vêtements de théâtre et de cinéma propose également des montres de poche.
Si le diable se niche souvent dans les détails, l’horlogerie se niche parfois dans les lieux les plus incongrus: entre des chemises à jabot façon XVIIIe siècle ou des pantalons de sans-culottes révolutionnaires. Lorsque le chaland pousse la porte du magasin Theatr’Hall, idéalement situé carrefour de l’Odéon à Paris, son regard est tout d’abord attiré par la profusion de masques d’inspiration vénitienne et de redingotes en velours de coupe Empire, avant de découvrir un lot de montres gousset signées Berthet ou Laval. Cette caverne d’Ali Baba est tenue par Daniel Boczmak, spécialiste du costume et de l’accessoire façon théâtre.
Montres gousset et cannes à pommeau d’étain
En 1968, le jeune Daniel Boczmak, alors âgé de 18 ans, demande à son père, qui fut tailleur de sur-mesure dans sa Pologne natale, de lui réaliser des vêtements dignes de cette révolution de pacotille pour aller lancer avec élégance des pavés sur les barricades. De fil en aiguille, c’est le cas de le dire, il se met à réaliser lui-même ses vêtements, puis à en faire commerce. Il commence par offrir des modèles élégants et classiques à sa clientèle des bureaux du 2e arrondissement, où il a ouvert boutique en 1973. Puis un jour, par curiosité autant que par défi, il se met à créer des vêtements d’inspiration théâtrale, qui puissent également être portés en dehors de scène.
En 1995, c’est le déménagement dans l’actuelle boutique du carrefour de l’Odéon, un quartier plus touristique et commerçant. Depuis lors, comédiens et amateurs de déguisements, participants à des jeux de rôles grandeur nature ou futurs mariés trouvent jabot à leur goût dans son échoppe. Et puisqu’il faut bien étoffer l’offre, accessoiriser le vêtement, Daniel Boczmak se spécialise dans les objets de qualité à prix abordable. D’où les montres gousset qu’il se procure chez Berthet, un horloger installé dans le Jura français, qui fabrique des garde-temps à glisser dans la poche de sa redingote. Sans être un expert en matière d’horlogerie, on sent toutefois chez Daniel Boczmak un amour du bel objet et de la belle ouvrage qui lui font préférer les modèles mécaniques aux modèles à quartz, et désigner sans hésitation un modèle squelette lorsqu’il s’agit d’élire son coup de cœur.
Ces accessoires, comme les cannes à pommeau d’étain, les boutons de manchettes et autres lavallières sont surtout prisés par les particuliers, bien plus encore que par les costumiers de théâtre ou de cinéma. Point n’est besoin en effet d’investir dans une véritable tocante pour briller sous les sunlights des scènes parisiennes: une vulgaire imitation fera l’affaire aux yeux du public. Le cinéma et ses gros plans est plus exigeant. Mais si Daniel Boczmak a fourni un lot de 150 chemises à la production de Pirate des Caraïbes, il avoue n’avoir jamais encore vu l’une de ses montres avoir les honneurs du grand écran.
Theatr’Hall, 3 carrefour de l’Odéon, 75006 Paris, www.theatrhall.com
Aline SteinerWorldtempus |