Les faillites dans l’horlogerie se multiplient
 
Le 13-07-2010

Le chômage dans la branche est resté supérieur à 10% au mois de mai. De nombreuses marques sont encore menacées

Villemont, Universal Genève, Voltime, Wyler, Vincent Bérard, BNB Concept, Leonard et Favre-Leuba. La liste des sociétés horlogères disparues, mises en hibernation ou qui rencontrent des difficultés financières ne cesse de s’allonger. Dernière en date, Revue Thommen Watch SA, fondée en 1853 et rachetée il y a un peu moins de dix ans par le groupe Grovana, a été mise en liquidation, selon le registre du commerce.

Si les exportations horlogères ont retrouvé le chemin de la croissance depuis quelques mois, les effets collatéraux de la dernière récession conjoncturelle (2008-09) se font encore ressentir pour nombre d’entreprises. Alors que les grands groupes affichent désormais des taux de croissance vigoureux, de petites sociétés restent exsangues, prises à la gorge.

«Beaucoup de marques ont essayé de baisser leurs coûts, notamment en réduisant les frais de marketing et de personnel. Cela n’a pas suffi pour survivre à une crise qui se prolonge», explique Olivier Müller, consultant horloger.

Ainsi, entre septembre 2008 et 2009, vingt entités horlogères ou de sous-traitance ont disparu, selon le dernier recensement de la Convention patronale de l’industrie horlogère (CPHI). Il s’agit d’un recul de 3,2% par rapport à l’ensemble des entreprises du secteur.

Ce tableau n’est de loin pas exhaustif. En effet, le délai – jusqu’à ce qu’une entreprise tombe en faillite – peut, selon les circonstances, se compter en mois, voire en années. Les statistiques de la CPHI, couvrant 2009-2010, devraient montrer une accélération de ce phénomène. Sur la même période, 4000 emplois ont été supprimés, soit une contraction de 9,8% des effectifs totaux. Au mois de mai, le taux de chômage horloger est en outre resté très élevé. Malgré des embauches en hausse, il s’est fixé à 10,1%, tandis que la moyenne nationale tous secteurs confondus s’avère près de trois fois inférieure (à 3,7%).

Fournisseurs en péril

Selon Pascal Crespin, de l’antenne neuchâteloise du syndicat Unia, la situation des fournisseurs, en comparaison de celle des marques, reste encore plus délicate. «Surtout ceux en fin de cycle de production, comme les sertisseurs.» Le syndicaliste craint un automne difficile. «De mauvaises nouvelles risquent encore de nous parvenir. Il y aura forcément des répercussions de la crise monétaire européenne, de la force du franc et de toutes les incertitudes qui planent encore sur le redressement économique», selon lui. Il estime que le recours au chômage partiel, mesure massivement utilisée au pire moment de la récession, n’est pas près de disparaître.

«Il y aura encore de dix à vingt marques qui vont rester sur le carreau, ce qui n’est pas négligeable, mais elles ne représentent pas plus de 5% des marques Swiss made», détaille Olivier Müller. Il faut encore ajouter vingt à trente sociétés dont les activités seront gelées ou mises en état de survie virtuelle, selon lui.

Beaucoup d’entreprises, éprouvant des difficultés de trésorerie, ne peuvent pas ou plus faire appel à de nouveaux investisseurs. Ces derniers sont devenus frileux face à une industrie qui a connu des déboires, mais où les attentes étaient aussi souvent irréalistes. Et malgré les chiffres des exportations – qui laissent à penser que grâce à l’Asie le marché horloger tourne à nouveau –, ce sont surtout quelques grandes sociétés à forte notoriété sur ce continent (Omega, Longines, Tissot, Cartier, Rolex, etc.) qui tirent leur épingle du jeu. Ainsi que quelques marques de niche.
Bastien Buss

Le Temps

 

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