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La société horlogère de La Chaux-de-Fonds va étoffer ses effectifs de 10%. Une quarantaine de personnes sont recherchées
Au sortir d’une crise économique que nombre de spécialistes décrivaient comme la pire depuis 1929, le rebond de l’horlogerie suisse s’est avéré beaucoup plus rapide et fort que prévu. «Personne n’avait anticipé ou vu venir une reprise aussi vigoureuse. Nous-mêmes avons été surpris», témoigne Jean-Christophe Babin, directeur général de TAG Heuer. Grâce à ce redressement, au lancement de nouveaux produits, dont ceux équipés avec un mouvement chronographe mécanique en grande partie réalisé à l’interne et à des efforts soutenus en marketing, la société en mains du groupe français de luxe LVMH revendique même un exercice record sur l’année écoulée.
«Nous avons atteint un plus haut historique, même plus élevé qu’en 2008. La progression s’élève à deux chiffres», indique le patron, qui n’en dira pas plus en raison des contraintes boursières imposées à un groupe coté. Ainsi, la croissance réalisée en 2010 pourrait s’élever à environ 30%, selon des estimations concordantes de la banque Vontobel et du Temps. Ce qui serait supérieur à la moyenne des exportations horlogères suisses. En 2008, la société avait réalisé des ventes de l’ordre de 850 millions, toujours d’après des estimations.
«Ce résultat est d’autant plus réjouissant que pour nous la Chine n’est pas notre premier marché. Notre croissance est certes tirée par l’Asie, à l’instar de l’ensemble de l’horlogerie, mais elle émane aussi des autres parties du monde, comme les Etats-Unis, marché pourtant déclaré comme moribond», détaille ce Français à la tête de la société depuis dix ans maintenant. Cette année, l’Empire du Milieu, avec Hongkong, devrait devenir le troisième marché en importance pour la marque chaux-de-fonnière qui a fêté ses 150 ans l’an passé.
«Dans ce pays, nous ne voulons pas progresser tous azimuts, mais de manière graduelle et qualitative dans notre réseau de distribution.» Une trentaine de points de vente viendront s’ajouter dans ce pays aux 110 déjà ouverts. «Nous déployons en parallèle un réseau de boutiques en propre. Cette année, nous allons en doubler le nombre, passant de dix à vingt.» Une dizaine d’autres verront le jour dans divers marchés.
«L’objectif est de garder une ventilation géographique équilibrée de nos ventes. A l’heure actuelle, nous avons un trois tiers presque parfait.» En d’autres termes, les Amériques génèrent 30% des ventes, l’Europe – Moyen-Orient inclus – et l’Asie 35% chacune. Jean-Christophe Babin fait partie de ces patrons qui ne veulent en aucun cas négliger les Etats-Unis, peut-être trop vite enterrés comme débouché d’importance pour l’horlogerie suisse.
«Ce pays possède encore énormément de potentiel pour une marque comme la nôtre. Bien sûr, beaucoup de choses y ont changé depuis la récession. Notamment le fait que ce ne sont désormais plus des achats sur dette mais sur épargne. Cela nécessite de la part des consommateurs davantage d’efforts. Dans ce contexte, le rapport qualité-prix est devenu encore plus crucial», analyse le directeur général, présent à Genève cette semaine, en marge des salons horlogers, pour tirer profit de la présence des détaillants du monde entier et présenter une nouvelle innovation, un chronographe mécanique au 1/100e de seconde avec affichage central, entièrement réalisé en interne.
Jean-Christophe Babin, pour accompagner la croissance de ses ventes, est à la recherche de 40 nouveaux collaborateurs, soit une hausse de 10% des effectifs, qui se montent aujourd’hui à 400 personnes entre les sites de Cornol (JU) et La Chaux-de-Fonds. «Et cela pourrait être encore plus lors du deuxième semestre.»
Et comment le patron de la quatrième marque horlogère helvétique en termes de chiffre d’affaires voit-il l’exercice en cours? «A moins que des financiers incendiaires et spéculateurs ne mettent à nouveau le feu, je le vois de manière férocement optimiste», anticipe-t-il. Mais de rappeler que, dans le secteur de l’argent discrétionnaire, les horlogers se battent non seulement entre eux, mais aussi face aux écrans plats de télévision et aux voyages aux Maldives.
Bastien Buss - Le Temps |