LUXE - Eternels rivaux, les géants français raffolent du Swiss made
 
Le 14-11-2011

LVMH, PPR, Hermès: les sociétés horlogères suisses ne séduisent pas que les consommateurs._

L’été a été agité pour les horlogers suisses et pour les groupes de luxe français. Temporairement ralenties par la crise, les acquisitions et fusions ont en effet repris de plus belle. Dernière en date, l’annonce de LVMH, faite ce jeudi. Le groupe possède notamment des marques comme Louis Vuitton, Dior et, dans l’horlogerie, TAG Heuer et Zenith, sans oublier Hublot. Cette semaine encore, LVMH a complété son intégration industrielle dans le secteur horloger, par l’acquisition de 100% des actions de ArteCad, l’un de ses principaux fournisseurs de cadrans de montres.

Cette société, basée à Tramelan, dans le Jura bernois, emploie 215 personnes et produit plus de 350 000 cadrans par an. Elle continuera à fournir ses cadrans pour d’autres acteurs de l’horlogerie suisse, a indiqué LVMH, qui se profile désormais comme la quatrième force de l’horlogerie suisse, avec Swatch Group, Richemont et Rolex.

Chacun avance ses pions

Cette opération n’est que la plus récente d’une série de coups stratégiques. PPR a fait le premier mouvement, avec la prise de contrôle à 50,1% des actions – pour un montant non dévoilé – de Sowind, qui englobe les marques Girard-Perregaux et JeanRichard. Le groupe français englobe de nombreuses marques de luxe, comme Boucheron, Gucci, Yves Saint Laurent. Basé à La Chaux-de-Fonds, Sowind Group faisait partie des dernières manufactures indépendantes et emploie plus de 200 personnes. Grand rival de PPR, LVMH n’a pas attendu pour réagir. Il s’était déjà offert Bulgari au printemps, au grand dam d’Hermès, avec qui il est en guerre depuis l’acquisition «surprise» de près de 20% du capital d’Hermès. Dans un deuxième temps, LVMH a poursuivi sur sa lancée, avec le rachat de La Fabrique du Temps, un atelier d’horlogerie genevois. Créée en 2007, cette société – spécialiste de la conception et de la création de mouvements horlogers haut de gamme – était déjà partenaire de Vuitton.

A son tour, cet automne, Hermès a acquis plus d’un tiers du capital de Joseph Erard, société familiale spécialisée dans les boîtiers de montres, qui emploie environ 60 personnes au Noirmont (JU), indépendante depuis 125 ans. Le groupe de luxe français était d’ailleurs déjà entré dans le capital de Vaucher Manufacture, à Fleurier (NE), en 2006.

A ce rythme, on peut se demander ce qu’il adviendra des marques suisses, hormis quelques enseignes de référence. Ces prises de participation et acquisitions par des groupes français sont-elles une menace ou une excellente nouvelle? Jean-Daniel Pasche, président de la Fédération de l’industrie horlogère suisse (FH), est optimiste. «Ce qui est important, c’est la volonté de l’acquéreur d’investir dans la marque et dans l’outil de production. Ce qui pourrait nous inquiéter, ce serait le rachat par un investisseur animé par une politique spéculative.»

Or, pour l’instant, cet intérêt d’acteurs étrangers est plutôt une preuve de confiance dans l’horlogerie suisse. «Ces groupes ont d’importants moyens en matière de recherche et de développement, ajoute Jean-Daniel Pasche. Il n’y a que deux axes de développement pour notre horlogerie: l’implication d’investisseurs étrangers et, en parallèle, le développement d’entreprises indépendantes.» L’un n’empêche pas l’autre. D’ailleurs, d’autres sont en quête de «perles». La manufacture soleuroise Eterna est désormais en mains du chinois China Haidian. Et c’est un groupe de négoce 100% zurichois, DKSH, qui s’est offert le jurassien Maurice Lacroix (200 collaborateurs, 70 millions de chiffre d’affaires).


Tribune de Genève - 12 novembre 2011

Katarzyna Gornik

 

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