CH/Corruption: la Suisse devrait durcir son arsenal législatif anticorruption
 
Le 09-12-2011

Les plus grandes sociétés suisses cotées en Bourse ont toutes adopté des programmes anticorruption. Mais leur application diverge largement d'une entreprise à l'autre. Renforcer la législation suisse permettrait de corriger le tir, estiment Ethos et Transparency International Suisse.

Dans le cadre de la journée internationale contre la corruption, les deux organisations ont publié vendredi une étude commune axée sur la Suisse. Transparency International Suisse s'est focalisée sur le cadre légal tandis que la fondation Ethos a passé en revue les pratiques des 20 sociétés réunies dans l'indice Swiss Market Index (SMI), à l'exception notable de Swatch Group, dont les informations et les publications en la matière étaient trop lacunaires.

DES FAIBLESSES

En accord avec la législation suisse, toutes les sociétés analysées publient un code de conduite interdisant explicitement la corruption publique, constatent les auteurs de l'étude. Cependant "les écarts significatifs quant aux mesures prises face à certaines formes de corruption démontrent les limites de l'autorégulation", relèvent-ils.

De fait, les pratiques des entreprises divergent considérablement en ce qui concerne la corruption privée, la corruption indirecte (par exemple via l'usage d'agents ou d'intermédiaires), les paiements de facilitation (versements à des fonctionnaires pour accélérer les procédures administratives de routine) ou encore les financements politiques.

A titre d'exemple, seules cinq sociétés du SMI déclarent explicitement interdire formellement les paiements de facilitation. Ce petit nombre s'explique notamment par le fait que la pratique n'est pas couverte par le Code pénal pour les fonctionnaires étrangers, selon l'étude.

Le soutien aux partis politiques est un autre cas problématique. Si treize sociétés déclarent avoir adopté des règles pour gérer la question, celles-ci sont généralement peu ambitieuses et se limitent au simple respect des lois en vigueur. Là encore, les dispositions légales en la matière sont peu contraignantes pour les sociétés.

L'enquête relève en outre que des écarts significatifs existent dans les systèmes d'alerte, qui permettent aux collaborateurs de dénoncer les cas de fraude. Des mécanismes sophistiqués côtoient des systèmes beaucoup plus basiques n'offrant pas le même degré de protection. La faute à l'absence pour l'heure de disposition légale en Suisse formalisant la protection de ces "whistleblowers".

PLUS AMBITIEUSE

Si la Suisse a intégré avec succès dans son droit national les instruments nécessaires pour lutter contre la corruption publique, elle doit durcir les sanctions encourues par les sociétés lorsque la responsabilité de ces dernières est engagée, concluent les deux organisations.

En outre, l'arsenal juridique doit s'étendre de manière plus systématique aux formes plus complexes de corruption, insuffisamment couvertes par la loi et dont "les effets sur la société et l'économie ne sont pas moins dommageables que ceux de la corruption publique", selon elles.

A cet égard, la législation suisse doit s'inspirer des règles plus ambitieuses qui existent aux Etats-Unis et au Royaume-Uni, estiment-elles.

SIX CRITÈRES

Pour dresser leur état des lieux, les auteurs de l'étude ont retenu six critères allant de l'implication des instances dirigeantes des entreprises (conseil d'administration, direction) en matière de lutte contre la corruption, à l'adoption et à la mise en oeuvre de ces principes.

Ils se sont essentiellement appuyés sur des données publiques, tels que les rapports annuels ou les codes de conduite maison des entreprises, mais Ethos précise avoir aussi utilisé des informations qui lui ont été communiquées par les sociétés elles-mêmes.

La fondation Ethos regroupe plus de 120 caisses de pension et fondations d'utilité publique suisses et a pour objectif de promouvoir les investissements socialement responsables. Fondée en 1995, la section suisse de Transparency International s'engage pour sa part pour la prévention et la lutte contre la corruption en Suisse.

romandienews

 

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