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L’expansion du groupe vaudois Valmont est coupée net. Pékin lui refuse des licences «sans aucune justification»
L’eldorado chinois peut parfois se muer en cauchemar pour les entreprises suisses. Tracasseries administratives, autorisations non renouvelées, licences stoppées et d’autres chicaneries peuvent faire partie du quotidien, au même titre que des progressions significatives des ventes. C’est l’expérience difficile qu’est en train de vivre la société vaudoise Valmont Group, active dans les cosmétiques.
«Sur les 31 produits que Valmont souhaitait enregistrer en Chine en 2011, seulement deux ont pu l’être, 22 ayant été refusés, et sept sont en attente de décision, sans qu’aucune explication ne nous ait jamais été donnée», déplore, amer, Didier Guillon, président de l’entreprise. Des articles pourtant validés et commercialisés dans d’autres pays. Valmont affirme que de nombreuses marques de cosmétiques rencontrent des difficultés similaires. L’entreprise, sise à Morges, a fait appel à des avocats et des conseillers et a également sollicité l’entregent de l’OSEC – centre de compétence de la promotion du commerce extérieur suisse –, sans résultat toutefois.
«C’est, selon moi, avant tout un problème politique. On ne peut rien faire, même si la Chine fait partie de l’OMC depuis dix ans déjà», soupire le président. L’OSEC confirme des problèmes pour bon nombre d’entreprises helvétiques. «C’est surtout le cas pour les sociétés actives dans les medtech. Mais cela commence aussi dans les cosmétiques», selon un porte-parole, qui évoque des excès bureaucratiques, voire du protectionnisme de la part des Chinois.
Contrefaçons découvertes
Si rien n’évolue «et c’est ce que je crains», d’après Didier Guillon, Valmont n’aura que deux produits à vendre en Chine en 2013. Autant dire que maintenir une présence locale ne se justifierait plus pour cette société qui réalise un chiffre d’affaires global de 50 millions de francs, dont 3 à 4% dans l’Empire du Milieu. Cette part ne cesse de croître et Valmont a consenti de gros investissements dans le pays, notamment en créant une filiale à Pékin, forte d’une quinzaine d’employés. L’ambassadeur de Suisse avait même fait le déplacement lors de son inauguration.
La complexité de l’appareil administratif chinois ne facilite rien, avec une multiplication d’intermédiaires tels la Chinese State Food and Drug Administration, le bureau d’investigation de la police chinoise pour la sécurité intérieure ou le Public Security Bureau. S’ajoutent encore à cette nébuleuse toutes les entités politiques.
Phénomène aggravant, Valmont a été victime de contrefaçons dans l’Empire du Milieu. Grâce à une société d’investigation spécialisée dans ce domaine, un important trafic de produits contrefaits a pu être mis au jour dans une usine à Guangzhou, puis démantelé. «Le problème, c’est qu’une structure identique peut jaillir ailleurs, n’importe où dans le pays», d’après Didier Guillon. Les interdictions de licences d’importation dont sa société est victime et de facto les restrictions au marché chinois pour ses cosmétiques sont justement une porte ouverte à la contrefaçon, regrette le président de l’entreprise qui emploie au total 200 collaborateurs. La Suisse est actuellement en négociations avec la Chine pour parvenir à un accord de libre-échange. Mais d’ici à ce qu’il entre en vigueur, les difficultés risquent de perdurer. Raison pour laquelle Didier Guillon espère un accord imminent.
En vingt ans, les exportations suisses vers la deuxième puissance économique mondiale sont passées de 415 millions de francs à 7,47 milliards en 2010.
LE TEMPS
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