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Platine, palladium, argent. Certains cousins de l’or voient leur valeur s’apprécier d’un quart depuis le début de l’année. Cette hausse spectaculaire s’explique par leur rôle hybride de placement refuge mais également de métaux industriels
* Product management & development, Swiss & Global Asset Management
Les métaux précieux blancs ont entamé l’année 2012 de manière spectaculaire. En moins de deux mois, le prix du platine a grimpé de 24%, celui de l’argent de 23% et le cours du palladium a gagné quelque 10%. La rapidité de ces hausses est étonnante, d’autant plus que ces trois métaux précieux avaient clôturé l’année 2011 sur de fortes corrections. Apparemment, l’appréciation de leur valeur a totalement changé en quelques semaines.
Comment expliquer ce phénomène? A l’instar d’autres matières premières, les scénarios et les paramètres fondamentaux sur ces métaux n’évoluent pas du jour au lendemain. Il est donc peu vraisemblable qu’un élément totalement inédit ait brutalement fait son apparition.
L’évolution des prix observée au cours des dernières semaines reflète par conséquent une appréciation du marché à court terme. Déterminée par la crise de l’euro et la politique monétaire, elle occulte des bases de décision essentielles pour un engagement à plus long terme. Un exemple de tels facteurs? La réunion du Federal Open Market Committee (FOMC) du 25 janvier. La déclaration annonçant que les taux du marché monétaire américain resteront sans doute bas jusqu’en 2014. Les métaux précieux n’ont pas tardé à réagir. Dans le sillage de l’or, dont le cours a gagné 76 dollars l’once en deux jours, le prix des métaux précieux blancs s’est également fortement apprécié. L’argent a profité de cette dynamique pour progresser de 1,80 dollar l’once en deux jours. Durant la même période, le platine a gagné 62 dollars l’once et le palladium, 9 dollars.
Les chiffres du marché américain de l’emploi fournissent un autre exemple de signal fort. L’annonce de la création de 243 000 emplois le 2 février dépassait les prévisions des analystes et devenait très positive. Concernant les métaux précieux, cette évolution impliquait le passage de l’aversion au risque à la propension au risque. L’or en a immédiatement subi les conséquences, enregistrant une correction de 40 dollars l’once. En même temps, les métaux précieux blancs ont pu en bénéficier, leur application principale dans l’industrie leur permettant de profiter d’un essor économique potentiel. L’argent a confirmé son niveau, tandis que le platine et le palladium gagnaient environ 10 dollars l’once.
Pour les investisseurs, il convient de s’interroger sur l’opportunité de prendre en compte ces impulsions à court terme. Les ignorer n’est pas forcément conseillé: même si l’évolution à court terme du marché se dissocie des données réelles, elle émet des signaux dans l’optique de l’attrait relatif du niveau actuel des cours. La hausse des prix depuis le début de l’année s’est en effet avérée aussi forte que la performance d’un ou de plusieurs trimestres sur un marché haussier.
Il importe de ne pas perdre la vue d’ensemble. Si nous consultons notre boule de cristal pour 2012, nous constatons que les métaux précieux blancs – à l’exception du palladium – sont en croissance du côté de l’offre et qu’un excédent de demande est peu vraisemblable dans le contexte actuel de la crise de l’euro. Le potentiel de forte hausse est par conséquent limité. Les grèves actuelles en Afrique du Sud, pays représentant 80% de l’offre mondiale, nuancent toutefois cette hypothèse. Ces grèves ainsi que le sous-approvisionnement conséquent ont généré une hausse de 24% l’once cette année. Si l’offre continue de se réduire, le prix du platine pourrait tout à fait atteindre 1800 dollars l’once.
La situation est quelque peu différente sur le palladium, où des signaux positifs proviennent d’une industrie automobile affichant de solides chiffres de vente. En cas de redressement durable de ce secteur, un palladium avoisinant les 900 dollars l’once semble réaliste.
Le potentiel de l’argent reste tendanciellement associé à l’évolution de l’or. Un prix d’environ 40 dollars l’once est envisageable si l’or évolue autour de 1900 dollars l’once. Et si les deux métaux sont soutenus par une demande stable en investissements.
Une analyse fondamentale de l’offre et de la demande révèle donc que les métaux précieux blancs continueront à offrir un solide potentiel à l’avenir, même sans facteurs de hausse à court terme. Mais leurs possibilités d’application industrielle signifie que le potentiel de l’argent, du platine et du palladium ne se déploiera totalement que si la relance économique s’avère durable.
LE TEMPS
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