Pas de fin de la crise de l’euro en vue : l’économie suisse
 
Le 05-06-2012

La crise de l’euro se poursuit. L’incertitude de taille qui prévaut affecte de plus en plus la con-
sommation et les investissements dans l’ensemble de l’Europe, même la locomotive conjonctu-
relle européenne qu’est l’Allemagne est touchée. Franc fort oblige, l’économie suisse se trouve
toujours dans une phase de transformation, où les entreprises luttent pour leur compétitivité.
Dans ces conditions difficiles, elle s’en sort bien, c’est réjouissant. Au total, l’organisation faî-
tière de l’économie, economiesuisse, table sur une croissance du produit intérieur brut (PIB) de
0,9 % en 2012 et de 0,8 % en 2013. Les taux de chômage resteront relativement bas et
l’évolution des prix sera presque nulle.


La crise de l’euro pèse sur les exportations
L’économie suisse se trouve face à des défis. En raison du franc fort, de nombreuses entreprises lut-
tent toujours pour renouer avec les bénéfices. L’appréciation du franc est de plus en plus considérée
comme un fait accompli. Au cours des derniers trimestres, nombre d’entreprises industrielles ont opti-
misé leur structure de coûts et accru leur productivité. Cependant, les entreprises cherchent de plus
en plus à se démarquer de la concurrence internationale par davantage d’innovation et à compenser
les désavantages en termes de coûts par une plus-value. Dans l’ensemble, l’industrie exportatrice hel-
vétique a bien résisté jusqu’ici aux taux de change défavorables. Aujourd’hui, le feu couvant de
l’endettement en Europe fait reculer encore la demande des principaux marchés d’exportation. En
2011 et 2012, la Suisse a profité dans une large mesure de la conjoncture robuste de l’Allemagne.
Tandis qu’en France et en Italie, qui absorbent à elles deux 15 % environ des exportations suisses de
marchandises, la demande est faible depuis quelque temps déjà, l’Allemagne enregistre toujours des
taux de croissance positifs. Toutefois, cette dynamique fléchira vraisemblablement aussi outre-Rhin
sous l’effet de la crise de l’euro.

Le secteur du tourisme pâtit particulièrement des difficultés actuelles sur le plan de l’économie exté-
rieure. Il faut s’attendre à un nouveau recul du nombre de visiteurs en provenance des pays européens
dans le courant de 2012. La consommation intérieure et l’évolution dynamique de la croissance des
marchés asiatiques devraient avoir un effet stabilisateur. Le secteur de la finance, caractérisé par des
coûts en francs et des revenus dans d’autres monnaies, peut compenser en partie les taux de change
désavantageux par les apports de fonds, ce qui freine le recul de sa création de valeur. En ce qui con-
cerne les industries chimique et pharmaceutique, qui tout comme le secteur financier affichent une
valeur ajoutée élevée par poste, les difficultés budgétaires de certains États étrangers entraînent des
concessions en termes de prix et une contraction des chiffres d’affaires. La branche a su y faire face
plutôt bien, grâce aux mesures prises pour accroître l’efficacité. Néanmoins, l’industrie horlogère coiffe
les autres secteurs au poteau : elle profite du boom de la demande sur des marchés émergents, asia-
tiques principalement. Ce tour d’horizon met en avant un atout de l’industrie helvétique, sa grande di-
versification géographique et sectorielle, qui lui permet de compenser du moins en partie le fléchisse-
ment de la demande en Europe. La situation est particulièrement difficile dans les industries des m a-
chines, du papier et du textile, confrontées à des baisses de prix et de volumes parfois importantes.
Dans l’ensemble, economiesuisse table sur une légère baisse des exportations de 0,6 % pour 2012 et
de 1,0 % en 2013. Au vu des conditions difficiles pour les entreprises exportatrices, il faut s’attendre à
des hausses de salaire modérées à l’automne. Cela réduira les désavantages de coûts de l’industrie
suisse, principalement par rapport à l’Allemagne, où les augmentations de salaire seront massives
pour la première fois depuis des années.

L’économie intérieure reste robuste
L’économie suisse doit aussi s’adapter à l’évolution des conditions-cadre. Depuis que le franc est fort,
davantage de nouveaux concurrents étrangers sont présents en Suisse et le tourisme d’achat fait recu-
ler les chiffres d’affaires du commerce de détail. Il n’en reste pas moins que la consommation des mé-
nages et la construction pour des particuliers continuent de croître, ce qui s’explique par l’immigration,
le faible taux de chômage et le niveau historiquement bas des taux d’intérêt. Les pouvoirs publics sou-
tiendront également la conjoncture en 2012 et 2013 avec des dépenses de consommation et
d’investissement légèrement supérieures.

D’une manière générale, l’économie table sur une croissance réelle du PIB de 0,9 % en 2012 et de
0,8 % en 2013. Petite économie ouverte, la Suisse se trouve au centre de l’Europe et est affectée par
les évolutions négatives de celle-ci. Les taux de croissance helvétiques resteront donc, ces deux pro-
chaines années, nettement en dessous de la croissance potentielle de la production. Dans le contexte
de la crise de l’euro, les taux de croissance sont très positifs et témoignent d’une économie compéti-
tive. Les taux de chômage resteront relativement bas avec 3,3 % (2012) et 3,5 % (2013). Dans la me-
sure où l’industrie suisse s’est déjà retirée progressivement depuis des années de la fabrication de
produits à forte intensité de main-d’œuvre, les suppressions d’emploi dans l’industrie exportatrice se-
ront relativement modérées – malgré une contraction des volumes dans les industries textile, des ma-
chines ou des emballages.

La décision de la Banque nationale suisse (BNS) de fixer un taux de change plancher avec l’euro a fait
ses preuves jusqu’ici. Cette mesure a redonné aux entreprises la sécurité en matière de planification
dont elles ont besoin. economiesuisse part du principe que la Banque nationale suisse maintiendra,
ces prochains mois, les taux d’intérêt à court terme en raison des problèmes majeurs et persistants
dans la zone euro. Les choses pourront évoluer dans le courant de 2013 seulement, si la crise de
l’endettement se stabilise et que la fonction de valeur refuge du franc s’estompe à nouveau. Malgré
des taux d’intérêt historiquement très bas, le risque d’inflation est faible pour cette année et la suivante.
Les légères hausses de prix sur le marché intérieur seront compensées par la déflation importée, de
manière qu’on puisse s’attendre, cette année, à une légère baisse des prix et à des prix stables l’année
prochaine.

La Suisse au centre d’une zone euro affaiblie
Visiblement, l’épée de Damoclès qui menace l’évolution économique suisse est la crise de
l’endettement européenne. Sachant que, dans les États les plus touchés, les banques détiennent une
grande partie des obligations d’État, la crise de l’endettement est devenue synonyme de crise du sec-
teur bancaire. En particulier en Espagne, des amortissements de taille s’ajoutent aux excès immobi-
liers, détériorant encore les bilans des banques. D’une manière générale, le système bancaire euro-
péen reste fragile cinq ans après l’éclatement de la crise des marchés financiers. La contraction des
bilans et l’arrivée de nouveaux capitaux prennent du temps. De plus, les mesures d’assainissement ont
un effet secondaire négatif, la raréfaction du crédit dans le secteur privé, qui pose un sérieux problème
pour la croissance. Les mesures d’austérité pèsent également sur l’économie européenne. Sous ces
prémisses, il ne faut pas tabler sur la croissance dans la zone euro. Les prévisions actuelles se fondent
sur une stagnation de l’économie européenne, malgré des taux de croissance positifs en Allemagne.
La croissance restera faible en Europe également en 2013. En d’autres termes, economiesuisse ne
s’attend pas à une résolution rapide de la crise de l’euro. Le risque d’une perte de confiance totale
dans le système bancaire, surtout dans les États d’Europe du sud, est latent. Un effondrement, pos-
sible, de la Grèce pourrait même provoquer une récession marquée en Europe, laquelle affecterait
également l’économie suisse. La gravité de cette éventuelle récession dépendra de la manière, contrô-
lée ou non, dont la Grèce sort de la zone euro et de la possibilité d’éviter une contamination de l’Italie
et de l’Espagne. Des retraits massifs en Espagne par exemple auraient des conséquences drama-
tiques sur l’économie européenne. L’instauration d’un mur coupe-feu crédible pourrait en revanche
restaurer la confiance dans le système financier. Une croissance durable en Europe n’est possible que
si le système bancaire est stabilisé et que les réformes urgentes sont mises en œuvre.

economiesuisse

 

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