Prix Rolex à l’esprit d’entreprise - Cinq lauréats de cinq continents
 
Le 04-07-2012

Le 13 juin, Rolex a annoncé les noms des lauréats des Prix Rolex à l’esprit d’entreprise 2012. Les cinq pionniers distingués réalisent des projets novateurs en Australie, Bolivie, Etats-Unis, Kenya et Russie.

Pour son édition 2012, les Prix Rolex à l’esprit d’entreprise ont connu un grand engouement. En effet, quelque 3’500 dossiers ont été déposés - plus du double des dernières éditions -, provenant de 154 pays différents (126 lors de la dernière édition). L’âge moyen des participants a baissé passant de 46 ans à 41 ans. Le pourcentage de femmes a quant à lui passé de 23 à 28%, un taux jamais atteint à ce jour.
Les membres du jury interdisciplinaire, qui réunit scientifiques, explorateurs, défenseurs de l’environnement, médecins, pédagogues et entrepreneurs de renom, ont nommé:

Sergei Bereznuk (51 ans), Russie
L’Extrême-Orient russe abrite 95% de la population survivante du plus grand tigre de la planète, le tigre de l’Amour (ou tigre de Sibérie). Entre 350 et 500 représentants de cette sous-espèce peupleraient aujourd’hui la région frontalière touchant la Chine et la mer du Japon. Si, grâce aux intenses efforts de conservation de ces dernières années, ils ne sont plus «en danger critique d’extinction» mais seulement «en danger» sur la Liste rouge de l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), ils n’en demeurent pas moins menacés, surtout par le braconnage.
Depuis dix-sept ans, Sergei Bereznuk, écologiste et ardent défenseur de la nature, lutte inlassablement pour sauver cette espèce. Le travail qu’il a accompli depuis 1995 avec une brigade antibraconnage du territoire de Primorié, dans l’Extrême-Orient russe, l’a convaincu que l’on ne pourrait sauver ce fauve que par des mesures antibraconnage efficaces et par l’éducation des habitants, deux axes essentiels du projet qui lui ont valu un Prix Rolex. Il considère en outre le tigre de l’Amour comme un agent capital de la conservation de son écosystème, la taïga.
A la tête d’une petite ONG environnementale depuis douze ans, le Phoenix Fund, Sergei Bereznuk déploie avec son équipe de six personnes un éventail d’activités impressionnant pour préserver cette espèce sur un territoire de 166’000 km2: soutien aux unités antibraconnage, sensibilisation de la population locale, lutte contre la réduction de l’habitat due aux incendies et à l’exploitation du bois, résolution des conflits entre l’homme et l’animal, indemnisation des dommages et surveillance des projets industriels invasifs dans la région.

Barbara Block (54 ans), Etats-Unis
Les grands prédateurs marins tels que requins et thons sont indispensables au maintien du fragile équilibre des écosystèmes océaniques. Or, la surpêche, la destruction des habitats et la pollution ont réduit leurs populations dans le monde entier. Pour inverser ce processus, les scientifiques préconisent notamment de créer, en haute mer, de vastes zones protégées préservant les aires de nutrition et de frai. L’une des difficultés majeures était de savoir où établir ces sanctuaires, les espèces à protéger étant de grands migrateurs, difficiles à suivre.
Barbara Block, professeure de biologie marine, a conçu des techniques de marquage électronique innovantes qui permettent de suivre le parcours des poissons. A la fin des années 90, elle a contribué à la mise au point de la première marque-archive pop-up reliée à un satellite, un dispositif qui se détache du poisson à une date préprogrammée et remonte à la surface, où il transmet par satellite les données archivées.
Barbara Block souhaite mettre au point la technique qui permettra de surveiller ces points chauds et de sensibiliser le public au sort des prédateurs marins qui évoluent le long de la côte ouest de l’Amérique du Nord. Son équipe se livre à une «océanographie de la conservation» faisant appel aux dernières avancées de la technologie des capteurs, des systèmes d’observation océanique et des méthodes informatiques pour fournir aux gestionnaires de ressources et aux décideurs politiques des données sur la durabilité des prédateurs marins, tant exploités que protégés.

Erika Cuéllard (40 ans), Bolivie
Le plus grand parc national de Bolivie, le Kaa-Iya del Gran Chaco, peut s’enorgueillir à la fois d’avoir le climat le plus chaud et sec d’Amérique du Sud et de compter septante espèces de grands mammifères, dont le jaguar, le puma et le tatou géant, qui vivent dans la forêt tropicale sèche protégée la plus vaste du monde.
C’est dans cet environnement hostile que travaille depuis plus de dix ans la scientifique Erika Cuéllar. La biologiste a été le fer de lance d’une action de conservation participative avec les Indiens guaraní qui vivent autour du parc. Elle axait son travail jusqu’à présent sur une meilleure gestion des herbages et le renforcement des capacités locales, en formant la population à prendre en main la conservation de son habitat.
Encouragée par les succès enregistrés dans le parc national, elle a désormais en point de mire l’ensemble de la région du Gran Chaco, à cheval sur la Bolivie, le Brésil, le Paraguay et l’Argentine. Habitée par des populations diverses, cette région abrite aussi, dans ses forêts et ses zones de brousse, 3’400 espèces de plantes, 500 espèces d’oiseaux et 150 espèces de mammifères, dont beaucoup n’existent nulle part ailleurs.
Les richesses naturelles du Gran Chaco subissent hélas depuis plus d’un siècle une érosion systématique. Une victime marquante de ces facteurs d’origine humaine est le guanaco, l’ancêtre sauvage du lama domestique. En 2007, afin de contribuer à la protection de cette espèce et de son habitat, Erika Cuéllar a conçu un cours qui donnerait à des membres de trois groupes ethniques natifs du Gran Chaco une formation de «parabiologistes». En tant qu’autochtones, ces parabiologistes peuvent aussi être un vecteur influent de transmission de l’éthique de la conservation à leurs communautés. Erika Cuéllar veut maintenant étendre ce modèle à l’Argentine et au Paraguay, et l’officialiser pour faire de la conservation une source durable d’emplois locaux.

Mark Kendall (40 ans), Australie
Mark Kendall travaille à un moyen bon marché et très efficace de réduire la mortalité due aux maladies infectieuses, qui se chiffre en millions de victimes chaque année dans le monde. Ces décès pourraient souvent être évités par la vaccination, mais la méthode traditionnelle de la seringue et de l’aiguille, inventée en 1853, est un handicap. Injecté dans le muscle (pauvre en cellules immunitaires), le vaccin n’est pas appliqué au point le plus efficace pour l’immunisation. De plus, la méthode est coûteuse et présente de nombreuses difficultés, comme la nécessité d’une conservation sous réfrigération, alors que dans beaucoup de pays l’approvisionnement en électricité est très aléatoire.
Le Nanopatch, que le professeur Kendall met au point dans un institut de recherche de pointe en bio-ingénierie à l’Université du Queensland (Australie), permettra d’éviter nombre de problèmes liés à l’aiguille et à la seringue.
Avec la méthode sans seringue conçue par Mark Kendall, un applicateur appose, sans douleur, le Nanopatch et ses microprojections sur une couche superficielle de la peau où la densité de cellules immunitaires cibles est très élevée. Il n’y a aucun saignement, ce qui réduit beaucoup le risque d’infection. Le Nanopatch est enrobé de vaccin séché, si bien qu’aucune réfrigération n’est nécessaire. Cet avantage et la diminution des doses vaccinales réduisent considérablement les coûts, y compris les frais de transport. A terme, le Nanopatch pourrait sans doute être appliqué par des agents communautaires ou des enseignants, sans que du personnel médical qualifié doive être présent.

Aggrey Otieno (34 ans), Kenya
Korogocho, quatrième bidonville de Nairobi par sa taille, abrite quelque 200’000 personnes sur une superficie de 1,5 km2 à peine, où règnent insécurité généralisée, mauvaises conditions d’hygiène et extrême pauvreté. On estime que chaque année 300 femmes souffrent d’hémorragie post-partum et 200 nouveau-nés meurent sur ce territoire du fait de l’absence de service d’obstétrique et de moyens de gagner un hôpital, et parce que les accoucheuses locales auraient besoin d’aide dans les situations d’urgence. Le taux de mortalité maternelle à Korogocho est d’environ 700 sur 100’000, contre 13 pour 100’000 aux Etats-Unis.
C’est justement après des études aux Etats-Unis qu’Aggrey Otieno est retourné dans ce bidonville – son lieu de naissance – pour améliorer la santé des membres de sa communauté en leur donnant des moyens d’action. Grâce à sa connaissance de la vie locale, le jeune homme est bien placé pour réaliser son projet: construire un centre de télémédecine doté d’un médecin de garde 24 heures sur 24 et d’une fourgonnette qui permettra d’éviter de nombreux décès.
Sous les auspices de l’organisation à but non lucratif Pambazuko Mashinani - dont il est le fondateur et directeur exécutif -, Aggrey Otieno utilisera le montant du Prix Rolex pour former des accoucheuses à reconnaître l’apparition de complications, afin de pouvoir au besoin alerter le personnel du centre par SMS. Ces praticiens qualifiés donneront immédiatement des conseils médicaux et, si nécessaire, enverront la fourgonnette chercher la femme pour la conduire à l’hôpital.

Une cérémonie en l’honneur des cinq nouveaux lauréats rassemblera plus de 400 personnalités éminentes du monde entier à New Delhi le 27 novembre prochain. Les nominés recevront chacun 100’000 francs suisses et un chronomètre Rolex. Ces cinq lauréats rejoignent les 115 personnes issues de 42 pays différents qui, par leur esprit d’entreprise et leur engagement en faveur de l’environnement et de l’humanité, ont obtenu au cours de ces trente-six dernières années, d’être distinguées et aidées par les Prix Rolex à l’esprit d’entreprise.

FHS

 

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