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Les métiers d’art ont la cote en horlogerie, et la manufacture Vacheron Constantin entend se poser en fervent défenseur de ces savoir-faire avec la création du Cercle 250, association d’entreprises mécènes appelées à soutenir divers projets et artisans.
Jamais autant que cette année les horlogers n’auront mis en valeur les métiers d’art dans leurs créations. Et pour cause, voilà un pan de savoir-faire qui a de longue date été préempté par les manufactures pour que leurs garde-temps, au-delà de leur complexité mécanique, révèlent leur dimension d’objets d’art. Si la gravure, l’art de l’émail ou le sertissage ont rehaussé de longue date la valeur artistique de pièces horlogères, l’arrivée d’autres métiers d’art dans l’univers de l’horlogerie renforce leur visibilité La redécouverte des métiers d’art par les manufactures horlogères est allée de pair avec le renouveau de l’horlogerie mécanique. Mais avec une quinzaine d’années de décalage. De fait, après avoir exploré tout (ou presque) de ce qui pouvait l’être dans le domaine de la complication horlogère, les horlogers ont découvert - pour certains - ou remis en lumière les métiers d’art.
Prise de conscience
En pionnière, Vacheron Constantin avait déjà fait de la promotion et la préservation des métiers d’art le cœur de sa campagne publicitaire il y a douze ans. Depuis elle a poursuivi cette revalorisation avec ses collections annuelles dont « Métiers d’art - Les Univers infinis » constitue la dernière en date. En parallèle, la marque s’est engagée à soutenir dès l’an dernier en France les Journées des métiers d’art, devenues dès cette année Journées européennes avec des événements et expositions en France, en Italie, en Espagne et en Suisse. Pour cette première en terre genevoise, un public nombreux s’est pressé dans les ateliers du Grand Théâtre. L’an prochain, le Portugal et l’Irlande devraient rejoindre le mouvement, tandis que Genève entend ouvrir d’autres lieux au public dans le cadre de ces Journées. Histoire de faire connaître ces métiers et, dans l’idéal, de susciter des vocations. Car l’attrait et l’intérêt croissants que suscitent aujourd’hui ces savoir-faire s’inscrivent dans une prise de conscience plus globale sur la valeur de l’artisanat, notent les professionnels. Quand bien même l’attention portée à des activités encore souvent ignorées varie grandement selon les régions. Dans certains pays – à l’instar de la France - une véritable prise de conscience politique est née sur les enjeux de la promotion, de la préservation et de la transmission de leur savoir par des maîtres d’art. Dans d’autres régions, les privés ont pris le relais pour contribuer à cette indispensable mise en lumière et transmission.
A la table des métiers d’art
C’est dans cette perspective que Vacheron Constantin s’est distinguée récemment. En annonçant en avril dernier la création du « Cercle 250 », la manufacture genevoise entend créer « une association d’entreprises mécènes » visant à soutenir, valoriser et transmettre ces savoirs que sont les métiers d’art, et ce bien au-delà de leur seul intérêt sous un angle horloger. Créé avec la maison japonaise de laque Zôhiko (fondée en 1661), le Cercle 250 est réservé à un nombre restreint de sociétés répondant à cinq critères. Il s’agit pour chaque entreprise candidate d’additionner 250 ans d’histoire ininterrompue, de réaffirmer un savoir-faire hautement manufacturé, de justifier une maîtrise de sa chaîne de valeur, de confirmer un héritage commun de valeurs fondatrices et d’authentifier un rayonnement international. Ces exigences ont permis à Vacheron Constantin de repérer quelque 150 entreprises répondant à ces critères, mais sans doute cette première liste n’est-elle pas exhaustive. On notera par ailleurs – joli coup marketing – que la manufacture genevoise sera de facto la seule société horlogère membre du Cercle 250, dès lors qu’aucune autre entreprise du secteur ne peut revendiquer plus de 250 années d’activités ininterrompues…
« Ces entreprises, créatrices de produits d’exception, seront conviées autour de la table des métiers d’arts », image Julien Marchenoir, directeur du patrimoine, en charge du mécénat chez Vacheron Constantin. Une magnifique soierie française pourra ainsi côtoyer la plus ancienne fabrique de papier du monde, en Italie ; une coutellerie japonaise datant du XVIIe siècle ou encore un parfumeur britannique, créateur d’effluves exclusifs depuis le XVIIIe siècle.
Appel à projets
CEO de Vacheron Constantin, Juan-Carlos Torres relève l’importance de la formation et de la transmission dans l’histoire de la marque. Il évoque que le premier document connu de l’entreprise – daté de 1755 - est un contrat d’apprentissage que Jean-Marc Vacheron proposa à un jeune pour lui transmettre son savoir. « C’est dire que l’ensemble de ce projet s’inscrit pleinement dans la réalité historique et la volonté de Vacheron Constantin d’assumer la transmission des savoirs et de donner un avenir à ceux qui les exercent, et ce au-delà du cœur de notre métier qu’est l’horlogerie ». « Parmi tous les métiers d’art, notre maison a mis ou met à contribution de manière régulière plus d’une vingtaine d’entre eux » poursuit Julien Marchenoir. « Ciseleur, marqueteur, fabricant d’automates, lapidaire, orfèvre, brodeur, nacrier ou encore maître verrier, pour n’en citer que quelques-uns. » La palette de ces métiers semble infinie, au point que certains, un jour disparus, renaissent désormais par la dynamique d’une connaissance recouvrée, d’une curiosité nouvelle d’une demande frémissante. Le Cercle 250 se projette dans ce mouvement et entend à la fois le favoriser et l’accompagner. En attendant l’annonce de nouvelles adhésions d’ici à l’automne à ce club d’entreprises mécènes chargées d’histoire, le Cercle 250 soutient déjà un premier projet en lien avec la Fondation Bodmer, laquelle s’investit dans la conservation et la restauration de manuscrits anciens afin d’assurer la transmission de ce patrimoine mondial. Le projet soutenu s’inscrit dans deux dimensions car il relève à la fois du patrimoine matériel et immatériel. Il va en premier lieu permettre la création d’un atelier de restauration au sein même de la fondation ; il donne par ailleurs pour mission à Florence Darbre, restauratrice, de transmettre durant au moins trois années sa pratique issue d’un parcours exceptionnel à une jeune restauratrice fraîchement diplômée. Le comité scientifique et culturel du Cercle 250 s’apprête à lancer le prochain appel à projet pour 2013. Le mouvement est lancé.
Crédits photos: Dr
Par Michel Jeannot
BILAN
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