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Le membre de la famille Hermès a été un personnage clé dans l’offensive de LVMH, lancée en 2010. Son gestionnaire suisse de fortune a lui aussi joué un rôle décisif
Les nouvelles révélations sur la stratégie du plus grand groupe de luxe pour tenter de s’emparer du célèbre sellier mettent en avant le rôle de Nicolas Puech-Hermès. Ce dernier occupe une place singulière dans la famille Hermès. C’est l’un des très rares héritiers de la dynastie à avoir refusé de rejoindre le holding familial, H51, créé en 2011 pour contrer l’ascension de LVMH au capital du sellier. Contrairement à ses 52 parents, qui ont bloqué pendant vingt ans leur participation dans le groupe, il estimait qu’un tel schéma risquait de le priver de son pouvoir de contrôle.
Le rapport de l’Autorité des marchés financiers (AMF) dévoile que c’est Nicolas Puech-Hermès qui a permis à LVMH de monter dans le capital d’Hermès. Les auteurs affirment qu’il a vendu 8,8 millions de titres Hermès aux banques mandatées par le groupe de Bernard Arnault. Sans ces actions, elles n’auraient pas pu mettre en place les «equity swaps», ce montage financier complexe et opaque qui permettra à LVMH de monter caché chez Hermès. Nicolas Puech-Hermès a contribué, selon l’AMF, à «68% du montant des titres acquis en couverture» par les banques.
C’est son gestionnaire suisse de fortune, Eric Freymond, dirigeant de Semper Gestion à Genève, qui a tout organisé. Un homme connu de l’AMF, qui l’a lourdement condamné en 2009, avec sa société Semper Gestion, «pour manquement d’initié dans l’affaire Afflelou».
Certains des titres Hermès, précise l’AMF, ont été livrés du compte de Nicolas Puech-Hermès sur celui de Dilico, une société ad hoc, dont le représentant légal, Alexandre Montavon, travaille pour LVMH et est également administrateur de Semper Gestion. Des ventes à terme qui préservaient l’anonymat du vendeur, selon l’AMF.
Nicolas Puech-Hermès affirme n’avoir jamais détenu plus de 6% du capital d’Hermès. Selon le rapport annuel 2012 du sellier, il possède 6,08 millions d’actions Hermès International, soit 5,76% du capital de l’entreprise. Cet homme de 70 ans, qui vit entre ses propriétés des Alpes suisses et d’Andalousie, et que Challenge classe au 31e rang des fortunes françaises, détient-il encore ses actions? Il assure que c’est le cas.
L’AMF note que l’investigation des enquêteurs s’est heurtée à «une absence de coopération satisfaisante», car Nicolas Puech-Hermès a refusé d’être auditionné. Eric Freymond – qui, lui, a répondu à l’AMF par écrit – a «toujours opposé le secret bancaire», affirment les rapporteurs. Mais une telle défense, font-ils valoir, «n’est pas applicable à son activité» puisqu’il n’est pas banquier.
Nicole Vulser
LE TEMPS
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