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Rolex : solennité et fête populaire, hier, à l'occasion du lancement officiel de la construction du Rolex Learning Center.
Qui a dit que les Suisses n'aimaient pas l'art monumental? Heureusement très différent des arcs de triomphe, le geste architectural que représente le Rolex Learning Center, que construit l'entreprise Losinger sur le site de l'EPFL, sera sans doute à ranger parmi les curiosités que l'on viendra voir de loin.
L'ambiance était à la fête, hier, sur le campus. Bien que le chantier soit ouvert depuis l'automne dernier, la cérémonie de la «première pierre» avait été retenue jusqu'à ce qu'elle puisse marquer le nonantième anniversaire de Maurice Cosandey, «créateur de l'EPFL à Ecublens» (24 heures d'hier).
Neuf messages pour l'avenir
Mais point de place pour une pierre, fût-elle symbolique, dans ce bâtiment tout de béton armé. En lieu et place, la direction de l'école a choisi d'enfermer dans un container scellé neuf valisettes. Chacune des cinq facultés de l'école y a déposé des symboles de ses recherches et de son actualité. Les bâtisseurs, les sponsors, l'association du personnel et celle des étudiants ont eu le même privilège. Sous les coups de pelle des officiels présents, l'objet a disparu dans la dalle de ce qui constituera le coeur du bâtiment: sa bibliothèque.
Un lieu de vie
Car tous l'ont rappelé à l'envi: ce futur symbole de l'EPFL se veut d'abord le point de ralliement des étudiants, le premier signe du «campus vivant» que le président Patrick Aebischer appelle de ses voeux. A ce titre, le représentant de l'Association générale des étudiants, Patrice Copin, s'est voulu de bon augure: «Le LC sera notre bâtiment, l'image à laquelle nous identifierons la qualité de notre formation. Nous sommes fiers d'appartenir à ce campus où il fait bon étudier, où il fera bon vivre.»
Devisé à 100 millions de francs, dont une moitié issue des caisses fédérales, ce lieu affichera officiellement le nom de son principal soutien privé: Rolex. «Ce partenaire avait deux exigences inconditionnelles: que le montant qu'il nous octroie ne soit pas dévoilé, et que la construction soit irréprochable», confie Nicolas Henchoz, porte-parole de l'EPFL. Présent à la fête, le directeur technique de l'entreprise horlogère, Jacques Baur, s'est donc contenté d'exprimer les ambitions communes à sa firme et à l'école: excellence, audace, progrès. Sponsor de la première heure, Daniel Borel, fondateur de Logitech et ancien étudiant de l'EPFL, lui a emboîté le pas: «Cette école doit jouer un rôle central dans le développement de la Suisse. Or c'est le poumon du campus vivant que l'on est en train de créer aujourd'hui.»
Douze ouvrages d’art au coeur d’un même bâtiment
«On dira de ce bâtiment qu’ils l’ont construit parce qu’ils ne savaient pas que c’était impossible.» Le mot est de Daniel Borel, fondateur de Logitech, et résume l’étendue des défis techniques que les plans du Rolex Learning Center ont posés aux constructeurs. Les dessinateurs Kazuyo Sejima et Ryue Nishizawa, du bureau japonais Sanaa, n’ont en effet pas ménagé leur audace pour parvenir à cette impressionnante «vague» posée sur un havre de verdure. Tour d’horizon avec Christian Maillet, directeur des travaux.
DEUX «COQUES» donnent du volume au gigantesque plancher (120 mètres sur 160, soit deux terrains de football côte à côte) du bâtiment. Pour en concevoir les plans, les ingénieurs de Losinger les ont séparées en douze voûtes, qui sont autant d’ouvrages d’art à réaliser. La plus longue a une portée de 80 mètres. Leur construction a exigé la fabrication de 1448 tables de coffrage, dont aucune n’est plate. Chacune devra être placée et ajustée individuellement. Un travail «diabolique», selon Eric Maino, ingénieur.
LE BÉTON qui sera coulé sur ces tables a dû être spécialement développé. Conçu pour supporter jusqu’à 6500 tonnes par mètre carré, il est renforcé par des barres d’acier de 5 cm de diamètre. Jamais utilisés en Suisse, ces ferrements ont d’abord dû être homologués.
D’ÉNORMES CÂBLES (115 mm de diamètre9 ont été tendus dans la dalle formant le plafond du parking souterrain. Ils supporteront la tension (jusqu’à 600 tonnes) créée par les voûtes à leur base.
DES VITRES COURBES fermeront chacun des «patios» destinés à illuminer l’intérieur du bâtiment. Les façades donnant sur l’extérieur, elles aussi totalement vitrées, seront quant à elles rectilignes.
Enfin, une gestion automatique des stores et de 350 bouches de ventilation, ainsi qu’un raccordement aux pompes à chaleur de l’école, permettra au bâtiment d’a rborer le label Minergie .
24 Heures / Emmanuel Barraud
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