Breguet dévoile sa Marie Antoinette
 
Le 06-04-2008

Nicolas G. Hayek en a rêvé, Breguet l’a fait. Trois ans et demi de travail auront été nécessaires pour créer la réplique de la montre de poche de la Reine la plus célèbre de France. Interview.

Un admirateur de la Reine l’avait commandé à Abraham Louis Breguet, mais ni Marie Antoinette, ni l’horloger n’auront la chance de l’admirer terminée. La montre de poche de Marie Antoinette a été achevée en 1827, soit 34 ans après la décapitation de la Reine et 4 ans après la mort de Breguet. Véritable chef-d’œuvre de complications horlogères, ce garde-temps a traversé les âges entourés de mystère puis dérobé lors d’un cambriolage d’un musée de Jérusalem.

Propriétaire de Montres Breguet, Nicolas G. Hayek c’est un jour mis en tête de reproduire la montre dans les ateliers de sa manufacture de L’Abbaye et de lui offrir un écrin fabriqué dans le bois du chêne de Versailles, l’arbre préféré de la Reine. S’engageant pour la reconstruction du Domaine de Marie-Antoinette et du Petit Trianon, Breguet acquiert l’arbre de Marie Antoinette et se met à la tâche.

Mais quelle tâche ! Ne disposant que de quelques rares archives, les horlogers de Breguet passeront de long mois à reconstituer le mouvement ultra-compliqué de ce garde-temps exceptionnel. « Elle est aujourd’hui terminée », s’emballe Nicolas G : Hayek, président du Swatch Group et de Montres Breguet, les yeux pétillants de bonheur. Présentée pour la première fois à Baselworld 2008, la réédition de la montre de poche de Marie-Antoinette s’affiche comme une œuvre d’art totalement exceptionnelle, en tous points fidèle à l’originale et dévoile une myriade de complications dont les heures sautantes, quantième perpétuel complet, répétition minutes, thermomètre ou encore équation du temps. Au total, la Marie Antoinette intègre quelque 823 composants aux finitions tout simplement remarquables. Interview de Nicolas G. Hayek.

Recréer la Marie-Antoinette, c’était une obsession ?

Plutôt un défi. Encore un que l’on m’a déconseillé de relever, tant le travail à abattre paraissait insurmontable. Aujourd’hui, lorsque je regarde cet objet d’art, je me dis que j’ai bien fait. Le résultat est merveilleux. C’est une grande fierté.

Combien de temps aura duré ce projet ?

Trois ans et demi au total. Cela a été un vrai travail de titan.

Pourquoi ?

Nous n’avions comme seule base d’information disponible quelques rares archives et très peu de photos de la montre, qui ne détaille pas les complications du mécanisme. Les horlogers de Breguet ont effectué une véritable prouesse pour recréer une copie parfaitement conforme à l’originale. C’est la preuve de leur immense talent. Ils sont même parvenus lors de leurs recherches à découvrir une complication qui n’avait jusqu’ici pas été répertoriée dans la Marie Antoinette.

Laquelle ?

Les heures sautantes. Encore une invention de Breguet !

Il y a quelques mois, la rumeur affirmait que la montre originale de Marie Antoinette avait enfin été retrouvée à Jérusalem. Avez-vous pu l’authentifier ?

C’est une histoire incroyable ! En janvier 2007, j’ai été contacté par un antiquaire qui prétendait l’avoir récupérée par hasard. J’ai souhaité la voir, et nous avons parlementé pendant plusieurs semaines pour que je puisse l’authentifier. Mais le musée de Jérusalem a, entre-temps, récupéré la pièce qui est aujourd’hui enfermée dans l’un de ses coffres.

Vous ne savez donc pas s’il s’agit de la véritable Marie Antoinette ?

Malheureusement non. On me demande de verser une somme conséquente pour avoir le droit de la regarder. Je ne suis pas d’accord. Toutefois, avant d’être déposée dans les coffres du musée, la montre a été montrée à quelques journalistes qui ont pu prendre des photos avec leur téléphone portable. Ils me les ont envoyées. Malgré la mauvaise qualité des photos, j’ai le sentiment qu’il s’agit bien de la pièce authentique.

Mais désormais, vous avez votre propre Marie Antoinette…

Oui, mais je ne peux m’empêcher de trouver cette situation vraiment regrettable. Il s’agit du patrimoine de Breguet.

Combien vaut aujourd’hui la Marie Antoinette ?

Elle est inestimable. Il est impossible pour l’heure d’établir un chiffre réaliste. Mais un jour, je ferai estimer la pièce que nous avons recréée. Pour l’heure, je me contente de l’admirer !

HOMMAGE À LA REINE

Marie Antoinette était une véritable admiratrice de Breguet. « A tel point, explique Nicolas G. Hayek, qu’en montant sur l’échafaud, la Reine tenait dans sa main une montre faite par l’horloger ». Autant dire que le choix d’utiliser le bois de l’arbre préféré de la Reine à Versailles pour en faire l’écrin de la réplique est un ultime hommage de Nicolas G. Hayek. Au total, 3500 pièces sculptées dans le bois du chêne royal constituent le coffre du chef-d’œuvre. L’extérieur reproduit fidèlement le parquet du Petit Trianon. L’ouverture de la boîte dévoile un deuxième écrin, plus petit, dont le dessus prend des airs de tableaux de maîtres. Il s’agit en réalité d’une marqueterie artisanale constituée de plus de mille fragments de bois qui dessinent la main de Marie Antoinette tenant sa rose. Un détail inspiré du célèbre portrait de la Reine. Au cœur, l’œuvre d’art elle-même impose tant par sa taille que sa myriade de complications. Sans oublier son passé si emblématique de la culture française du 18e siècle. Sublime.

Florence Noël FHH

 

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